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PATZÚN – L’été 2024 est le 17e que Josefina Mucia passe au Québec à cueillir des fraises pour la compagnie Fraisebec, l’une des seules entreprises agricoles à employer majoritairement des femmes. Chaque année, elle refait ses valises, dit au revoir à sa famille pour quatre à six mois… et prie très fort pour que ses parents, âgés, soient là à son retour.
Un mauvais tour du destin l’a guidée vers les champs du Québec.
La première saison a été éprouvante. Oui, le travail était difficile, mais ses trois « bébés » lui manquaient. « J’ai été malade, j’ai maigri, j’ai trop pleuré… Mais je savais que je devais continuer, pour eux, pour leur futur! »
Elle a su faire bon usage des deniers durement gagnés. Petit à petit, elle a construit une coquette maison pour elle et ses enfants, accolée à celle de ses parents. « C’est ma maison. Elle n’est pas si grande ni parfaite, mais c’est la mienne. Et à son tour, mon fils va se bâtir près de moi », raconte-t-elle avec fierté.
Si ses trois enfants ont fait des études universitaires, son garçon a toutefois choisi de suivre ses traces. « Dans le contexte économique actuel du pays, même avec un diplôme, trouver un emploi avec un salaire intéressant est difficile », se désole la travailleuse étrangère temporaire.
Lors du passage de La Terre à Patzún en avril, le fils de Josefina terminait sa première ronde de près d’un an dans une usine de production de cannabis de la Mauricie. « Il travaille à l’intérieur, du lundi au vendredi. Je préfère qu’il soit dans un endroit comme ça plutôt qu’aux champs où le travail est dur. Je ne suis pas inquiète! »
Sa cadette aimerait suivre ses traces, mais elle ne le souhaite pas. « Nous travaillons sous la pluie, au froid ou sous le gros soleil, avec les moustiques… Je ne veux pas que ma fille vive ça. » Elle l’a plutôt encouragée à ouvrir sa propre boutique.
En effet, la cueilleuse de fraises est également une femme d’affaires! Elle possède une toute petite boutique comme il en existe des milliers au Guatemala. Elle y vend des produits d’usage courant, quelques légumes et des sucreries, notamment.
De l’autre côté de la rue, sa fille Estefany tient également boutique. Les vêtements traditionnels, jupes et huipils (chemisiers brodés), y côtoient les vêtements à la mode américaine.
« Le travail que je fais au Québec m’a permis de me lancer en affaires et d’aider ma fille à faire de même », explique-t-elle. Mais les revenus générés par ces commerces ne suffisent pas à lui permettre d’envisager de cesser les allers-retours annuels vers Sainte-Anne-des-Plaines, dans les Laurentides. « Je vais continuer, tant que je vais être capable. Pour aider mes proches, assurer un futur à ma famille, aider mes petits-enfants. » Sa dernière petite-fille est justement née le 9 juin. Il lui faudra attendre encore plusieurs mois avant de la serrer dans ses bras.
Ce reportage a été réalisé grâce à une bourse du Fonds québécois en journalisme international.