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Joint sur son cellulaire, le 19 janvier, le producteur laitier Callum McKinven, du Canton de Hatley, en Estrie, s’empresse de répondre à La Terre qu’il se trouve en Australie et qu’il devra la rappeler plus tard : « Je suis en route vers l’aéroport; je m’apprête à prendre l’avion pour rentrer au Québec. » Le propriétaire de la ferme Lookout Farm a été invité là-bas pour juger les expositions de vaches Holstein rouge et blanc et Suisse brune, à l’occasion de l’événement International Dairy Week.
« C’était la 5e fois que j’allais en Australie », précise plus tard en entrevue celui dont la réputation à l’international n’est plus à faire. Quelques mois plus tôt, en octobre, M. McKinven a participé à une autre compétition en Argentine, avant de mettre le cap vers l’Italie, en décembre. À la mi-mars, c’est la Colombie-Britannique qui l’attend. Ce passionné, qui a visité dans sa carrière 31 pays différents où il a jugé pas moins de 850 expositions, n’est pas près de se lasser de son train de vie peu commun. « J’en ferai aussi longtemps que je pourrai marcher et parler », lance le producteur en riant. « Chaque fois que je suis invité quelque part, c’est un honneur. »
Le Québec reconnu à l’international
Au Québec, 36 personnes portent le titre de juge officiel Holstein, qui confère une reconnaissance à l’international. La province est l’une de celles qui en comptent le plus au pays, avec l’Ontario. Avant d’avoir ce statut, les aspirants doivent passer par un processus de sélection rigoureux, qui leur permet de développer une expertise. Si les juges sont souvent sollicités à l’étranger par l’entremise de Holstein Canada, plusieurs reçoivent aussi des invitations personnelles. « Callum [McKinven], c’est vraiment une sommité. Dans son cas, sa renommée surpasse [son statut de juge officiel] », note Mélissa Marcoux, spécialiste de la vulgarisation et du transfert de connaissances à Holstein Canada.
Joël Lepage, producteur à Amqui dans le Bas-Saint-Laurent, garde précieusement en mémoire l’invitation qu’il a reçue en 2020 pour juger les vaches de race Holstein noir et blanc à la Swiss Expo, un événement de grande envergure en Europe.
L’organisation suisse le connaissait parce qu’il avait déjà pris part à l’événement plusieurs fois auparavant comme préparateur d’animaux. Dernièrement, ce dernier a reçu une autre demande personnelle pour juger un nouvel événement en France. « Le monde des expos, c’est un petit monde. Tout le monde est connu et suivi mondialement. »
La productrice Mélanie Boulet, de Saint-Michel-de-Bellechasse, dans Chaudière-Appalaches, s’est aussi fait solliciter directement dans sa carrière à quelques reprises. « Dès que tu fais [un événement] et que tu es aimé, le bouche-à-oreille va vite, mais c’est vrai dans l’autre sens aussi. Si tu n’es pas aimé, ça va vite », remarque celle qui porte le titre de juge officiel Holstein depuis 2004. Son frère, Pierre Boulet, est du même avis : « Quand le monde nous demande, c’est parce qu’on est recommandé par plusieurs qui nous ont vu juger. Moi, j’ai un pattern. Je juge toujours de la même façon. C’est connu que je juge les vaches et non les personnes. Que l’exposant soit populaire ou pas, ça n’influence pas ma décision », témoigne l’éleveur de Montmagny. Callum McKinven estime quant à lui que sa capacité à juger toutes les races l’a aidé. « La confiance dans
le ring, c’est important; il faut que tu montres que tu sais ce que tu fais. C’est une question d’énergie projetée », croit-il. Selon Pierre Boulet, les juges québécois se démarquent à l’international par leur rigueur, leur passion et leur volonté de s’impliquer pour le bien de la génétique bovine. Il estime que l’école des juges y est aussi pour quelque chose.
Une école de juges
Ce sont les associations provinciales Holstein qui nomment les candidats admis, d’abord sur la liste canadienne d’aspirants juges, puis sur celle de juges officiels. À Holstein Québec, un événement annuel d’ateliers et d’évaluation, la Conférence Expo-Juges, aussi appelée « l’école des juges », est l’occasion de faire une sélection d’aspirants. Entre deux et quatre sont choisis chaque année par un comité de juges expérimentés. « Les candidats doivent avoir un bon résultat à l’évaluation et passer une entrevue. Souvent, ils ont déjà baigné dans le milieu des expositions, soit comme exposant ou comme préparateur d’animaux », explique la coordonnatrice du programme, Geneviève Drolet.
Une fois admis sur la liste d’aspirants, ceux-ci peuvent juger dans des expositions locales pour prendre le plus d’expérience possible. Une probation de trois ans est requise avant de demander à être juge officiel. « Les aspirants doivent se trouver un mentor qui leur donne des conseils et leur dit quoi améliorer. Des membres du comité vont aussi aller les voir juger. »
Après leur probation de trois ans, les prétendants au titre de juge officiel sont de nouveau évalués, lors de simulations de jugements, à la Conférence des juges. Ils doivent placer les animaux dans le bon ordre au classement et bien justifier leur décision au micro. Ils sont également évalués sur leur ponctualité, leur attitude, leur posture et ce qu’ils dégagent dans l’arène. Le comité se base sur la performance des candidats lors de la simulation, mais aussi sur les informations recueillies à leur sujet durant leur probation pour décider s’ils seront intégrés ou non à la liste de juges officiels.