Forêts 30 octobre 2014

Le prix du sirop stimule la production… américaine

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Tel que publié dans La Terre de chez nous

Les craintes des producteurs de sirop d’érable du Québec se confirment. Les producteurs américains profitent largement du système québécois de mise en marché pour assurer leur développement accéléré.

Les acériculteurs québécois, seuls à assumer les coûts de cette mise en marché, doivent par ailleurs anticiper des baisses de leurs ventes aux États-Unis.

Ces sombres constats sont tirés d’une étude commandée conjointement par la Fédération des producteurs acéricoles du Québec et le Conseil de l’industrie de l’érable, représentant les acheteurs accrédités. Les conclusions de cette étude réalisée par la firme-conseil Forest Lavoie sont présentées ce mercredi matin au cours de l’assemblée générale annuelle (AGA) de la Fédération. En exclusivité, la Terre a obtenu les grandes lignes de l’étude financée avec la collaboration de Québec et d’Ottawa. Un chercheur d’une université américaine y a aussi participé.

« Cette étude démontre l’intérêt des acheteurs et des producteurs à travailler ensemble. C’est à nous de trouver les moyens de conserver nos parts de marché », commente le directeur adjoint de la Fédération, Paul Rouillard.

L’analyse révèle notamment que sous l’effet de bons prix, le nombre d’entailles a effectué un bond de 36 % en 10 ans aux États-Unis. Les 11 millions d’entailles ont généré une moyenne de 2,86 lb à l’entaille pour atteindre un sommet de 39,4 millions de livres en 2013. Le nombre d’entreprises de plus de 10 000 entailles a doublé entre 2002 et 2012, les 211 acériculteurs accaparant aujourd’hui plus de la moitié de la production.

L’un des auteurs de l’étude, Gilbert Lavoie, prévoit une croissance importante de la production américaine, inférieure toutefois à celle de la demande. En 2018, cette production pourrait totaliser 44 millions de livres sous l’effet bénéfique des progrès technologiques et des bons prix (2,71 $/lb l’an dernier). La technologie et la stabilité du prix du sirop, précise l’analyste, exercent une forte influence sur l’expansion de la production américaine. Si le prix du sirop génère un faible impact sur la fluctuation de la consommation, un léger surplus de sirop sur les marchés entraînerait en contrepartie une forte baisse des prix.

Les chercheurs concluent que les acériculteurs québécois perdront des parts de marché américain après avoir eux-mêmes financé sa croissance. De fait, les ventes québécoises estimées devraient représenter 93 % du marché américain en 2018, en baisse de 6 %.

Le système québécois de mise en marché a démontré son efficacité à stabiliser les prix et l’offre de sirop, ajoute l’analyste. Pourtant, les producteurs québécois sont les seuls à payer les coûts de leur système de commercialisation, soit les contingents, les paiements différés et les frais de mise en marché. Ils financent aussi leur réserve stratégique évaluée à 60 millions de livres. À la lumière de ces constats, l’analyste recommande de travailler à retenir davantage les bénéfices du système afin de préserver le leadership du secteur acéricole québécois.

« Internaliser les bénéfices passe entre autres par une fidélisation des acheteurs », affirme Paul Rouillard. Celui-ci indique que des initiatives de ce type, expérimentées depuis l’an dernier, ont entraîné des résultats intéressants. Les acheteurs ont notamment obtenu certains rabais progressifs après avoir dépassé leur moyenne d’achat des trois dernières années.

« À notre grande surprise, déclare Paul Rouillard, ç’a très bien marché. On discute présentement avec les acheteurs sur la possibilité d’instaurer d’autres mécanismes afin de les inclure dans la prochaine convention de vente. »