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Selon les plus récentes données de Statistique Canada, le Canada a enregistré une récolte record en 2023.
De fait, la production totale a atteint 128 801 000 quintaux, comparativement à 123 520 000 quintaux en 2022, ce qui représente une augmentation de 4,3 %. Toutefois, lorsqu’on scrute plus attentivement ces données, c’est un portrait contrasté qui ressort entre les provinces de l’Est et celles de l’Ouest.
Les affres de la météo dans l’Est
« La vraie histoire, déclare Victoria Stamper, directrice générale des Producteurs unis de pommes de terre du Canada [UPGC], c’est de la pluie dans l’Est, non seulement au Québec, mais aussi à l’Île-du-Prince-Édouard et au Nouveau-Brunswick. » Par conséquent, ces trois provinces ont affiché une baisse de production, respectivement de -5,5 %, -7,1 % et -12,5 %. « L’Ontario s’en est mieux tiré », constate-t-elle, sa production s’étant accrue de 5,4 %.
Une croissance dans l’Ouest
Dans l’Ouest, malgré la sécheresse, le scénario a été tout autre. Le Manitoba et l’Alberta ont augmenté leur production, respectivement de 13,9 % et de 19,6 %. Au total, l’Alberta a produit 32 063 000 quintaux de pommes de terre et le Manitoba, 29 760 000 quintaux, surpassant l’Île-du-Prince-Édouard (25 813 000 quintaux).
En outre, l’Alberta a connu le meilleur rendement au pays en 2023. En moyenne, la province a produit 419 quintaux de pommes de terre l’acre, comparativement à 311 à l’Île-du-Prince-Édouard.
D’après elle, cette croissance est également attribuable à l’augmentation de la superficie cultivée dans l’Ouest, alors qu’à l’Est, celle-ci est demeurée plus stable. Ensemble, l’Alberta et le Manitoba ont enregistré des surplus dans le secteur de la transformation qui sont venus combler les besoins de l’Est.
« Il y a un mouvement de l’ouest vers l’est, car même au Québec, la production ne comble pas tous les besoins du côté de la transformation », observe Mme Stamper.
Un même constat dans l’Ouest américain
À l’instar de l’Ouest canadien, l’Ouest américain a connu une année record. D’après un tableau combinant des données du National Agricultural Statistics Service de l’USDA et de Statistique Canada réalisé par Mme Stamper, l’Idaho (141 900 000 quintaux) et Washington (101 170 000 quintaux) se classent au premier et au deuxième rang respectivement, dépassant largement l’Alberta, au troisième rang, et le Manitoba, au cinquième rang.
Selon elle, la croissance dans ces deux États américains s’explique par l’augmentation de la superficie cultivée et de la demande dans le secteur de la transformation combinée à un meilleur rendement en 2023.
« Les deux États ont fini avec des surplus dans le secteur de la transformation, comme l’Alberta et le Manitoba. »
Quelques perspectives pour 2024
Sans posséder de boule de cristal pour la saison 2024, la directrice générale estime qu’il est possible que la superficie cultivée pour le marché de la transformation baisse, selon les contrats obtenus avec les usines, « pas beaucoup en pourcentage, mais quand même ». « Côté table, selon ce que j’entends, ça va rester stable. » Pour les semences, après deux années à la baisse pour les acres certifiées, « on espère que ça va rester stable, parce que sans le secteur des semences, on ne peut pas survivre ».
Par ailleurs, si les producteurs sont habitués aux aléas de la météo, les changements climatiques sont maintenant « beaucoup plus extrêmes » et « engendrent des dépenses », dit-elle. Dans l’Ouest, par exemple, « on s’attend à de la sécheresse » et « on commence à regarder pour le manque d’eau dans les réservoirs ». Dans l’Est, évidemment, « on espère avoir moins de pluie ».
Sur une note positive, Victoria Stamper mentionne qu’il « se fait actuellement beaucoup de recherche sur les variétés de pommes de terre plus résistantes aux maladies et aux conditions météo et beaucoup d’investissements dans la technologie », notamment « ce qu’on appelle l’agriculture de précision » pour optimiser les rendements.
Et au Québec?
Sarah-Maude Larose, directrice de mise en marché chez les Producteurs de pommes de terre du Québec (PPTQ), confirme que « la saison 2023 a été difficile au Québec ».
« En ce moment, indique-t-elle, il y a une forte pression sur les marchés au Québec et dans l’Est à cause de l’abondance des volumes disponibles dans les autres régions, comme l’Ouest canadien et l’Ouest américain, qui ont vraiment eu de bons rendements. Il y a des volumes qui transitent d’ouest en est pour aider les usines à remplir leurs besoins, particulièrement dans la table qui est un marché plus libre et plus sujet à la volatilité liée à l’offre et à la demande. »
Cette situation fait aussi en sorte « qu’on a moins d’exportations aux États-Unis, puisqu’ils ont amplement de patates pour subvenir à leurs besoins », ajoute-t-elle.
Pour la saison 2024, des rendements moyens sont escomptés pour être en mesure d’atteindre les budgets. « C’est là qu’entre en ligne de compte la question des changements climatiques auxquels on doit s’adapter pour réussir à stabiliser nos rendements […]. » En ce qui a trait aux catégories, « on s’attend à ce que les superficies restent plutôt stables dans les secteurs de la table et des semences », dit Mme Larose en apportant cette précision.
« En 2023, nous avons eu une récolte de semences inférieure d’environ 15 % à la moyenne sur 5 ans, malgré des superficies ensemencées similaires. Cette baisse de volumes peut complexifier l’approvisionnement en semences du Québec et demander une plus grande attention à la logistique. En 2024, la superficie ensemencée devrait toutefois être similaire à celle des dernières années et, avec de bonnes conditions de croissance, la demande des producteurs commerciaux devrait être comblée en 2025, si tout va bien. »
Dans les secteurs de la croustille et du prépelage, « on s’attend à des hausses dans les superficies pour répondre aux besoins des usines de transformation ».
Parmi les tendances, dans la table, « les variétés jaunes sont en croissance versus les variétés rouges qui sont en décroissance », suivant les préférences des consommateurs, conclut Sarah-Maude Larose.