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Le chancre bactérien causé par la bactérie Clavibacter michiganensis affecte les cultures des solanacées en champ et en serre, particulièrement la tomate et le poivron. Cette bactérie représente d’ailleurs l’une des maladies les plus importantes et destructrices de la tomate cultivée en sol ou en serre hydroponique, où elle peut causer des pertes de rendement de 20 à 85 %.
Les symptômes du chancre bactérien diffèrent chez la tomate de serre comparativement au fruit cultivé au champ. En serre, le premier symptôme se manifeste par le flétrissement des folioles dans la tête du plant, qui se propage ensuite sur un seul côté du plant. Sur les plants matures, on reconnaît l’infection aux brûlures grisâtres qui se déploient sur les folioles des feuilles médianes et basales, qui deviennent par la suite beiges. Les premières infections peuvent apparaître dans les semences ou provenir de l’environnement des jeunes plants, tandis que les infections secondaires se développent par les ouvertures naturelles des feuilles, ou par des blessures causées lors des opérations culturales et la manipulation des transplants. La bactérie se transmet ainsi par des plants contaminés qui propagent l’infection de blessure en blessure, et peut survivre jusqu’à cinq ans dans le sol.
La bonne nouvelle, c’est qu’un projet d’étude amorcé en 2022 se penche sur de nouvelles solutions innovantes qui allient à la fois la biofertilisation des plants et le biocontrôle de l’infection. « Notre projet vise en particulier le biocontrôle du chancre bactérien causé par la bactérie Clavibacter michiganensis chez la tomate », confirme Eric Déziel, professeur en sociomicrobiologie à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS). Dans le cadre de cette étude, le chercheur s’est joint au Consortium de recherche et innovations en bioprocédés industriels au Québec (CRIBIQ) avec l’entreprise de fertilisants à valeur ajoutée AGRO-100. Les travaux du consortium visent à trouver des solutions aux agents pathogènes qui affectent les fruits et légumes.
Les « superbactéries » : une approche multitâche
La culture de serre comporte par ailleurs un autre enjeu, particulièrement en matière de culture biologique, où les exigences quant aux méthodes et aux produits sont plus contraignantes. « La culture de la tomate requiert évidemment de la fertilisation. Les défis sont plus grands en régie biologique », reconnaît le professeur Déziel. C’est ici que certaines souches bactériennes ciblées pour leurs propriétés multitâches entrent en scène. « Il est bien connu que certaines bactéries peuvent stimuler la croissance des plants en les colonisant, par la production de phytohormones et par l’expression d’activités bénéfiques, comme la solubilisation du potassium, la fixation de l’azote, etc. », indique le chercheur. « De plus, plusieurs bactéries biostimulantes et biofertilisantes peuvent également inhiber les phytopathogènes par la compétition et la production de molécules inhibitrices. Notre approche est de développer un produit à base de bactéries biostimulantes et antagonistes, afin de favoriser la croissance et la productivité de la tomate, tout en la protégeant contre le chancre », résume M. Déziel.
À mi-parcours de ce projet de trois ans, quelques dizaines de souches bactériennes possédant les caractéristiques recherchées ont été isolées. Les chercheurs ont ensuite vérifié l’activité antagoniste de ces bactéries et leurs capacités de fertilisation in vitro. « La prochaine étape sera de les tester sur des plants de tomate afin d’évaluer les effets biostimulants, puis ensuite choisir les plus intéressantes pour des essais d’infections expérimentales avec Clavibacter [michiganensis], en espérant pouvoir offrir une protection contre l’infection », indique M. Déziel. Le professeur souhaite parvenir à répertorier les bactéries appropriées pour l’utilisation par les agriculteurs d’ici moins de deux ans. À terme, les chercheurs se donnent pour mission de développer des produits biofertilisants qui agissent aussi comme agents de lutte contre certaines infections courantes en agriculture biologique.