Ma famille agricole 9 janvier 2024

Une fratrie complémentaire aux commandes

SAINT-LÉONARD-D’ASTON — De toute évidence, la complicité entre les trois frères Leblanc, de Saint-Léonard-d’Aston, dans le Centre-du-Québec, est à la base du succès de l’entreprise dont ils ont pris la relève en délaissant la production laitière pour se lancer dans l’élevage bovin. Ils ont ainsi développé un modèle d’exploitation efficace en faisant eux-mêmes la mise en marché de leur production écoulée jusqu’à Montréal.

Les frères Jean-Philippe, Pierre-Luc et Gabriel Leblanc vont souligner, en 2024, le 15e anniversaire de leur installation aux commandes de l’exploitation familiale de Saint-Léonard-d’Aston, la Ferme Leblanco.

« Ça allait de soi qu’on prenait la relève, qu’une cinquième génération exploiterait l’entreprise », affirme Jean-Philippe en faisant visiter les installations du 10e rang avec ses deux frères.

Ma femme et moi, on se demandait comment les gars allaient réussir à concilier leurs emplois d’agronomes et les tâches à la ferme. Ils ont réussi!

Mario Leblanc

L’expression de leur père Mario, qui participe à la visite, confirme sa fierté devant les réalisations de ses fils, même si ces derniers avaient résolu dès le départ d’abandonner la production laitière pour se lancer dans l’élevage bovin. C’était là une condition sine qua non pour que les trois frères puissent concilier leur emploi d’agronomes et le travail à la ferme.

« La production laitière amenait son lot de contraintes, qu’il était difficile de concilier avec nos occupations professionnelles », explique Pierre-Luc. « La production bovine offrait la flexibilité dont nous avions besoin. »

Les trois frères ont ainsi pris les commandes de l’entreprise en 2009 et ont lentement délaissé la production ­laitière. « Ça s’est fait très lentement », raconte Mario Leblanc. « Quelques vaches de boucherie sont entrées dans l’étable, alors que nous faisions encore du lait. Puis on a vendu le quota pour se consacrer à l’élevage. »

Il y a quelques années, la vieille étable a été démantelée et un nouveau bâtiment a été érigé pour abriter le troupeau de 150 bêtes. La nouvelle génération de propriétaires a graduellement investi dans la modernisation de leurs équipements et, récemment, dans l’acquisition d’une nouvelle terre.

Le développement de l’érablière a été l’événement marquant de l’année 2023. La vieille cabane à sucre a été conservée même si des installations modernes ont été construites dans un autre boisé de l’exploitation. Photo :  Pierre Saint-Yves

Mais pour Mario Leblanc, le transfert des actifs de l’entreprise n’a pas signifié un départ à la retraite. « Bien sûr que je suis content qu’il y ait une relève, mais j’aime encore ça. Ce n’est pas difficile pour moi d’être ici tous les jours. »

Et les trois frères reconnaissent que la présence de leur père est un atout important. 

Parmi les précurseurs du « bœuf à l’herbe »

Dès qu’ils se sont installés aux commandes de l’exploitation, Jean-Philippe, Pierre-Luc et Gabriel se sont donné comme objectif de produire du bœuf de qualité. 

« On était déterminés à élever du bœuf nourri à l’herbe », raconte Pierre-Luc. « À l’époque, on connaissait le bœuf nourri au pâturage, mais l’appellation qui venait des États-Unis ne convenait pas ici, puisqu’il n’y a pas de pâturage plusieurs mois dans l’année. C’est alors qu’on a parlé de bœuf à l’herbe, une désignation qui n’existait pas vraiment. »

Ce choix allait avec son lot d’exigences que les jeunes producteurs se sont rapidement imposées. « C’était important pour nous de développer un produit de niche selon nos critères, nos valeurs, dans le respect du bien-être animal », explique Jean-Philippe. « Les bêtes sontnourries avec les meilleurs fourrages, mais il faut compter au moins deux ans pour engraisser les veaux. » 

Des projets pour l’avenir

Les trois jeunes producteurs reconnaissent avoir atteint la limite des capacités de leur exploitation, ce qui ne les empêche pas d’entretenir des projets d’expansion. « On a vraiment connu une grosse année de développement avec la réalisation de plusieurs projets », confirme Gabriel. 

Celui qui les a occupés au cours des derniers mois est le développement de l’érablière familiale après s’être classés lors de l’émission du contingent de 40 000 entailles pour la relève. La petite exploitation acéricole de quelques centaines d’entailles avec chaudière compte maintenant plus de 3 000 entailles réparties dans trois boisés. L’aménagement a été effectué au cours de l’été avec l’installation de la tubulure, en même temps qu’étaient réalisés la construction d’une salle de bouillage et de quatre stations de pompage ainsi que l’enfouissement des vacuums. « Nous sommes prêts pour notre première saison de production au printemps! » lance Pierre-Luc.  

Le bon coup de l’entreprise

Les frères Leblanc ont rapidement convenu de prendre en main la mise en marché de leur production. Selon Gabriel, la décision s’est imposée d’elle-même. « Pendant un an, on a essayé de fournir des épiceries, dit-il. On s’est vite rendu compte que c’était un processus trop lourd pour le temps qu’on pouvait y mettre en tenant compte de nos occupations d’agronomes. »

L’autre facteur qui a joué en faveur de la mise en marché à la ferme est le contrôle des prix. « On voulait se placer à l’abri des grosses fluctuations de prix en vendant des carcasses directement aux ­consommateurs », explique Jean-Philippe.

La moitié de la production est donc écoulée auprès de clients réguliers et l’autre moitié est livrée à un jeune boucher de Montréal, Pascal le boucher, qui offre à sa clientèle des produits de petites fermes familiales. « Il a choisi notre bœuf après avoir fait une dégustation à l’aveugle », se réjouit Jean-Philippe. 

Pour les trois éleveurs, la mise en marché à la ferme a été une excellente décision, qui leur a permis de bâtir une clientèle fidèle de leur région jusqu’à Montréal. Photo :  Pierre Saint-Yves

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Exploiter les forces de chacun

Les frères Leblanc sont tous trois agronomes, mais dans des spécialités différentes : Gabriel en agroéconomie, Pierre-Luc en production végétale et Jean-Philippe en production animale. « Évidemment, cette spécialisation nous permet de nous concentrer sur des occupations différentes », explique Jean-Philippe. « Nous avons une complémentarité qui est très profitable. »

Assurer une juste répartition des tâches

Les trois éleveurs, accaparés par leurs occupations professionnelles à l’extérieur de la ferme, ont convenu dès le départ d’une juste répartition des tâches. « Nous sommes présents à la ferme à tour de rôle », indique Pierre-Luc. « Les travaux sont divisés à charges égales et le samedi, on se retrouve tous les quatre avec notre père pour faire avancer le travail ou lancer de nouveaux chantiers. » Les jeunes éleveurs savent aussi qu’ils peuvent compter sur leur père, qui assure une présence quotidienne à la ferme.

Rechercher l’équilibre

C’est une préoccupation constante pour les quatre producteurs : maintenir un équilibre entre le travail à la ferme, les occupations professionnelles et la vie familiale. « Là-dessus, les gars ont fait converger nos valeurs », explique Mario Leblanc. « Pour eux, le dimanche est consacré à la famille, exactement comme c’était le cas pour nous. » 

La production laitière a été abandonnée à la ferme lorsque les trois frères Leblanc en ont orienté les activités vers l’élevage bovin. Photo :  Pierre Saint-Yves
Fiche technique
Nom de la ferme :

Ferme Leblanco

Spécialité :

Élevage de bovins de boucherie

Année de fondation :

1869

Noms des propriétaires :

Jean-Philippe, Pierre-Luc et Gabriel Leblanc

Nombre de générations :

5

Superficie en culture :

144 hectares (40 en prairie, 40 en maïs, 40 en soya, 12 en blé d’automne et 12 en pâturage) ainsi qu’une érablière de 3 000 entailles

Cheptel :

150 bovins Angus croisés avec Charolais et Simmental

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