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Une technique mise au point par une équipe de l’Institut de recherche et de développement en agroenvironnement (IRDA) pour développer une mouche drosophile à ailes tachetées mâle stérile pourrait bientôt aider à contrôler les populations de ce ravageur exotique dans les champs de petits fruits.
« Les conseillers nous demandent sans cesse : «Quand est-ce que ça arrive?» » rapporte Annabelle Firlej, spécialiste en phytoprotection à l’IRDA, pour montrer combien cette technique est attendue, notamment chez les producteurs qui souhaitent réduire ou éviter l’utilisation de pesticides.
Leur enthousiasme est justifié, estime la chercheuse, puisque les premiers résultats obtenus dans les champs d’un producteur de petits fruits de l’île d’Orléans sont prometteurs. « On a mesuré l’effet sur plusieurs semaines et ç’a été l’équivalent d’une régie traditionnelle avec application de pesticides », dit-elle.
Le projet est toutefois sur la glace depuis 2019, faute de financement supplémentaire pour passer à la deuxième étape. « On a pu produire des drosophiles stériles à la grandeur de notre projet de recherche. Mais pour continuer au champ et potentiellement développer un service, ça ne peut plus se faire ici. Il faut que la technique soit reprise par un partenaire privé qui pourra optimiser et grossir l’élevage », explique Élisabeth Ménard, professionnelle de recherche en entomologie fruitière à l’IRDA. « Après, ça serait de faire un deuxième round de tests au champ, en plus grande surface, probablement dans d’autres cultures aussi [que les fraises et les framboises] », ajoute Mme Firlej. La méthode de relâchement des insectes devra également être rajustée, précise Mme Ménard, « pour mieux évaluer où les insectes doivent être lâchés et dans quelle proportion pour que ce soit efficace ». Les deux chercheuses sont d’avis qu’une fois peaufinée, cette technique pourra s’ajouter aux autres outils pour combattre ce ravageur, contre lequel les pesticides et les filets d’exclusion sont d’autres méthodes efficaces.
Une vaste zone à « inonder »
L’un des grands défis que risque de rencontrer cette technique au Québec et qui nécessite un financement supplémentaire pour faire d’autres tests, spécifie Mme Firlej, est qu’il faudra relâcher des insectes stériles sur une vaste zone pour que ce soit efficace. « Il faut savoir que pour la mouche de l’oignon, les cultures sont très localisées chez quelques producteurs, alors que pour les petits fruits, il y en a partout, même du côté sauvage. Donc, on aura beaucoup de migration de drosophiles. Pour que ça marche, il faut donc traiter à l’échelle d’une région. On ne peut pas le faire uniquement à l’échelle d’un producteur. Il faut y aller plus large pour inonder une zone », explique-t-elle.
Cette technique de la mouche mâle stérile existait déjà pour combattre la mouche de l’oignon. En 2014, soit quelques années après l’arrivée de la mouche drosophile à ailes tachetées au Québec, l’équipe de Mme Firlej a obtenu un premier financement pour adapter la technique à ce ravageur et en tester l’efficacité dans les champs.
Des ennemis naturels de la drosophile arrivent au Québec
Parmi les différentes options de lutte contre la drosophile à ailes tachetées qui ont été évaluées par l’équipe de l’IRDA, l’une consiste à utiliser ses ennemies naturelles pour limiter sa prolifération. « On est allés voir dans les pays d’origine pour cibler ses ennemis naturels. Le projet s’est fini au mois de mars sur deux parasitoïdes, soit le Ganaspis brasiliensis et le Leptopilina japonica, qu’on a apportés à l’IRDA pour voir s’ils passeraient l’hiver », indique la chercheuse Annabelle Firlej. Entre-temps, ces insectes sont arrivés en Colombie-Britannique et en Ontario, et les premiers spécimens ont aussi été observés au Québec. « C’est une autre voie prometteuse [pour lutter contre la drosophile], car dès qu’on sait que ses ennemis sont là, on peut penser à toutes sortes de projets pour les favoriser. Est-ce qu’on peut les aider à se reproduire dans les champs, en évitant par exemple certains produits phytosanitaires qui peuvent les attaquer? » donne en exemple la chercheuse.