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Patricia Poulin et Michel Dutil, propriétaires de la Ferme porcine de Beauce, à Sainte-Marie, dans Chaudière-Appalaches, estiment être les derniers éleveurs indépendants à produire et posséder leur propre génétique porcine dans la province.
C’est le père de Mme Poulin, Jacques, qui s’est lancé dans cette discipline peu après avoir démarré une ferme porcine indépendante de type naisseur-finisseur, en 1975. « La génétique, ça l’a toujours intéressé. À un moment donné, il a acheté un verrat reproducteur à 700 $ ou 800 $ pour développer une lignée. Et les premiers porcelets étaient très performants. Ensuite, c’est devenu une vraie passion. Je me souviens que pendant une période, il y avait toujours un nouveau bâtiment en construction pour développer cet aspect de la production », raconte sa fille, Patricia, qui a depuis repris la ferme avec son conjoint.
Selon elle, dans les années 1980, quelques autres producteurs indépendants faisaient aussi de la génétique au Québec, et avaient même accès à des subventions gouvernementales pour les aider dans cette démarche. Depuis, le paysage s’est transformé et la génétique est devenue l’affaire de grandes entreprises, souvent internationales, tels PIC, AlpaGen (la division génétique d’Olymel), DNA et Hypor.
Or, si la Ferme porcine de Beauce continue de produire sa propre génétique, c’est que ses propriétaires en tirent encore plusieurs avantages : d’abord, pour le prix et ensuite, parce qu’ils aiment avoir le contrôle sur les traits génétiques qu’ils souhaitent développer pour leur troupeau.
« On a une clientèle qui aime notre génétique, souligne M. Dutil. On en a moins qu’il y a 20 ans, car plusieurs ont pris leur retraite et n’avaient pas de relève, mais on a encore un bon petit bassin de clients indépendants », souligne-t-il.
De son côté, Mme Poulin ajoute qu’elle trouve important de continuer le développement génétique pour garder une certaine concurrence afin que les gros joueurs « ne puissent pas monter les prix comme ils veulent ». « C’est sûr que tant que c’est rentable, on va toujours continuer à le faire. Mais dans les prochaines années, je ne sais pas où ça va s’en aller », admet la productrice. Celle-ci précise, par ailleurs, ne pas avoir le temps d’aller sur le terrain pour trouver de nouveaux clients comme peuvent le faire les grandes entreprises.
Des bâtons dans les roues
S’ils se sentent aujourd’hui appuyés par les Éleveurs de porcs du Québec et par le Centre de développement du porc du Québec (CDPQ), Mme Poulin et M. Dutil disent avoir eu des bâtons dans les roues il y a environ un an, alors qu’ils ont failli perdre accès au Centre d’insémination porcine du Québec.
« Le Centre pensait qu’on avait du mycoplasma et du SRRP [syndrome reproducteur et respiratoire porcin]. Il a fallu se battre et faire les tests pour prouver que nos animaux étaient exempts de maladies », indique Mme Poulin, qui raconte que la situation s’est finalement rétablie.
Malgré tout, cet accès au Centre d’insémination reste un enjeu important, « car si on le perd, on ne peut pas continuer notre développement génétique et on ne peut plus fournir nos clients », mentionne-t-elle.
Une autre difficulté est de ne pas avoir accès aux chiffres des grandes compagnies de génétique, qui gardent leurs données secrètes. « On se compare donc avec les trois ou quatre autres éleveurs qui font encore de la génétique de manière indépendante en Ontario. C’est aussi là-bas qu’on achète de la semence pour avoir du sang neuf », explique Mme Poulin.
Des performances « supérieures ou égales » à la moyenne
La Ferme de Beauce possède un élevage de type naisseur-finisseur de 400 truies. Elle possède également 10 verrats répartis entre trois races pures (Yorkshire, Landrace et Duroc) à la ferme, en plus d’avoir accès à la semence de dix autres au Centre d’insémination porcine du Québec.
Le couple estime avoir une génétique qui offre des performances « égales ou supérieures » à la moyenne des résultats des autres éleveurs indépendants en Ontario. « Nos porcelets en engraissement ont de très bonnes performances en pouponnière, ce qui leur donne une bonne erre d’aller en engraissement », estime M. Dutil. « Ça s’explique par notre sélection. On a travaillé le maternel [le nombre de porcelets à la naissance], mais on a aussi gardé une bonne importance pour le paternel [la croissance en engraissement] », précise Mme Poulin.
L’analyse des performances de leurs sujets pur-sang selon le rendement, l’âge, les muscles et le poids est effectuée par le Centre de développement du porc du Québec, qui envoie les chiffres au Centre canadien d’amélioration des porcs pour analyse. La Ferme de Beauce, qui paie les frais reliés à ces procédures, peut ensuite sélectionner ses meilleurs sujets en fonction des traits recherchés pour améliorer sa génétique.