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L’agriculteur n’aura bientôt plus besoin de se préoccuper de la ventilation optimale pour ses animaux. L’intelligence artificielle s’en chargera désormais pour lui, prédisent des experts.
« Cette technologie va prendre sa place en agriculture comme elle le fera partout dans nos vies », avance Guy Courcelle, directeur général de la firme JPS Électronique, surtout connue par sa marque de commerce Agrinuvo. « Nous n’en sommes qu’au tout début, mais on s’en va tous dans cette direction. »
Développés par différentes compagnies ces dernières années, ces systèmes intelligents sont en voie de s’imposer en agriculture. Basés sur des algorithmes puissants, ils s’affairent plusieurs fois par seconde à créer et à maintenir un environnement idéal à la croissance des animaux, et ce, au moindre coût énergétique possible.
Un réseau intelligent
Avec la compagnie technologique Penteract, basée à Québec, Ventec a conçu ces dernières années le système Agrimesh, doté d’une intelligence artificielle (IA) capable de gérer la ventilation en fonction des prévisions météorologiques.
« Un contrôle de base fait les ajustements en fonction de la température à l’intérieur du bâtiment. Le contrôle à intelligence artificielle, lui, est capable de voir à long terme ce qu’il va passer à l’extérieur. Par exemple, en hiver, il va emmagasiner de la chaleur durant la journée pour que la ventilation fonctionne adéquatement en soirée avec un minimum de perte de température », explique M. Blanchette.
L’IA fait une différence parfois flagrante, soutient ce dernier.
« Deux voisins, avec des bâtiments et des ventilations semblables, ont fait des comparaisons. Seuls leurs systèmes de contrôles étaient différents. À huit heures du soir, l’un ne trouvait plus ses vaches dans la brume de l’étable, tandis que l’autre pouvait y travailler comme à l’habitude. Pourquoi? Parce l’IA avait prévu la chute drastique de température. Elle avait emmagasiné de la chaleur pour maintenir une ventilation constante et chasser l’humidité du bâtiment sans en compromettre le confort », raconte David Blanchette.
Selon le directeur de Ventec, le système Agrimesh peut être installé dans les installations laitières, porcines ou avicoles. Son réseau de capteurs à connexion Wi-Fi ne nécessite aucun filage électrique. Les prévisions météo lui sont fournies par une connexion Internet ou par une station météo placée à l’extérieur.
Il peut ainsi calculer 9 000 combinaisons possibles, à un intervalle de deux minutes, pour maintenir une ventilation idéale.
L’IA permet des économies d’électricité, ajoute M. Blanchette. « Par exemple, un contrôle normal va lancer toute la ventilation à 21 degrés Celsius si c’est ce qu’on lui demande. Mais l’intelligence artificielle va plutôt calculer qu’elle peut baisser la ventilation de 20 % si le taux d’humidité ne met pas la vache en période de stress ou de chaleur. »
Intelligence sous supervision
Le système GIO (gestion intelligente des opérations) proposé par JPS Électronique fait aussi appel à une intelligence artificielle dite « assistée » (IAA), précise Guy Courcelle.
Axé sur le bien-être animal pour une croissance maximale, le GIO gère notamment la ventilation du bâtiment pour optimiser l’oxygénation et maintenir la température, tout en contrôlant les taux de poussière, d’humidité, d’ammoniac et de bioxyde de carbone.
« Le terme “intelligence artificielle” est souvent galvaudé pour des raisons commerciales. Une IA réelle ne peut fonctionner qu’avec des données recueillies sur chaque bâtiment différent pendant des années. Elle va ensuite copier les paramètres d’un événement déjà vécu », dit M. Courcelle.
C’est pourquoi le système proposé par la firme drummondvilloise, conçu par le manufacturier français Sodalec, est implanté graduellement chez le producteur en trois étapes.
Dans un premier temps, l’appareil laissera tout d’abord l’agriculteur gérer lui-même les paramètres de ventilation. C’est seulement après un an d’opération qu’il sera en mesure de procéder à des analyses et de proposer des recommandations. « L’agriculteur approuve la grande majorité des paramètres conseillés. Il peut laisser l’intelligence artificielle gérer la ventilation de manière optimale. Mais pas avant trois ans d’opération », croit M. Courcelle.
Le système Sodalec fait partie du concept Nordika, actuellement sur les planches à dessin de JPS Électronique. Ce bâtiment « du futur » regroupe sous un même toit les plus récentes innovations en matière d’alimentation, d’abreuvement, d’aération et d’éclairage. Des systèmes de filtration d’eau et d’air bloquent l’entrée de tout contaminant et mettent les animaux à l’abri de « tout fléau de demain », soutient Guy Courcelle.
De plus, un système de récupération de chaleur permettra des économies d’énergie de 60 %, ajoute-t-il.
Un premier bâtiment Nordika pourrait être mis en chantier au Québec ou en Ontario en 2024.
L’animal avant tout
La compagnie Monitrol, de Boucherville, fabrique et conçoit depuis 36 ans des contrôles électroniques et intelligents qui sont constamment en évolution, affirme son représentant technique, Sylvain Perron.
« Une intelligence artificielle est censée apprendre par elle-même, sans intervention d’un technicien. Jusqu’à présent, n’importe quel système sur le marché que je connais a besoin d’aide pour fixer les paramètres nécessaires à la base », avance-t-il.
Monitrol a développé son propre algorithme baptisé CFM+, qui est surtout utilisé dans les fermes avicoles.
« Ce système va gérer la ventilation en fonction des besoins de l’animal plutôt que de la température. Il va prendre en compte l’âge et le nombre d’animaux, ainsi que la température extérieure, pour calculer le nombre de CFM [cubic foot per minute] nécessaire pour les oiseaux et il va ajuster la ventilation en conséquence », explique M. Perron.
L’algorithme de CFM+ base ses analyses sur des chartes de croissance de la volaille en fonction de la température extérieure. Monitrol entend l’adapter éventuellement à l’industrie porcine.
Dans le secteur laitier, Monitrol concentre actuellement ses efforts sur les pouponnières à veaux. « Auparavant, on laissait les veaux avec leur mère à l’étable, avec plein de monoxyde de carbone et de grandes variations de température. Dans une pouponnière, on peut garder une température et une ventilation constantes. Cela fait de bons animaux de remplacement », conclut-il.