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L’amarante tuberculée (Amaranthus tuberculatus; AMATU), retrouvée au Québec pour la première fois en 2017, est maintenant présente dans 4 régions administratives et 13 MRC. Toutes les populations présentent de la résistance aux herbicides, dont 99 % des populations au groupe 2, 75 % au glyphosate et 22 % au groupe 5 (atrazine). Cette situation est loin de rassurer les producteurs.
Un projet de recherche1 réalisé au Québec entre 2020 et 2023 avait pour objectif de tester différentes méthodes de lutte contre l’AMATU. Un site expérimental en maïs a été établi en Montérégie afin de tester différents traitements herbicides appliqués à différents moments (en prélevée [PRÉ], en post-levée [POST], PRÉ + POST, PRÉ + POST+ atrazine et PRÉ + POST+ désherbage manuel). L’impact de l’utilisation du ray-grass comme culture de couverture a été testé en combinaison avec des herbicides en PRÉ, POST et PRÉ + POST.
Comme on peut le constater sur la figure 1, les résultats obtenus ont montré qu’il est possible d’atteindre un niveau de contrôle d’AMATU de plus de 98 % à la suite des traitements herbicides appliqués en PRÉ + POST, PRÉ + POST + atrazine, de même qu’en PRÉ + POST + désherbage manuel. Corroborant des études réalisées en Ontario et aux États-Unis, ces résultats indiquent qu’une stratégie à deux passages, incluant l’utilisation d’herbicides ayant une activité résiduelle, est à privilégier.
Le ray-grass peut compétitionner l’AMATU émergeant en fin de saison alors que l’activité résiduelle des herbicides commence à décliner. Par contre, il faut bien choisir une stratégie de désherbage qui soit compatible avec le ray-grass et efficace contre l’AMATU. Le traitement PRÉ + POST + ray-grass testé a eu un taux d’efficacité de 97 %, et ce, malgré un taux d’implantation du ray-grass de seulement 55 %. En comparaison, le traitement POST + ray-grass eu un taux d’implantation du ray-grass de 72 %, avec une efficacité contre l’AMATU de 95 %.
Des effets sur le rendement
Aucune différence au niveau du rendement moyen du maïs (13,43 t/ha) n’a été observée parmi les différents traitements évalués. Il est possible que la présence d’AMATU n’ait pas été suffisante afin de causer des pertes significatives. Lorsqu’isolée, l’AMATU est reconnue comme une plante peu compétitive, en particulier envers le maïs, dont la perte de rendement est évaluée à environ 1% lorsque moins de 10 plantes par pied carré sont présentes. De plus, les plantes d’AMATU émergeant après le stade 10 feuilles du maïs risquent très peu de nuire à son rendement.
Malheureusement, cela pourrait avoir l’effet de retarder les interventions ciblées contre cette espèce, notamment si elles sont considérées comme trop coûteuses par rapport aux pertes de rendement potentielles. Néanmoins, considérant qu’une seule plante femelle est capable de produire en moyenne 300 000 graines, et que le taux d’infestation peut radicalement changer d’une saison à l’autre, il est impératif d’établir une stratégie de lutte contre l’AMATU dès son apparition à la ferme. Une fois qu’elle est solidement établie, l’AMATU peut causer des pertes de rendement du maïs allant jusqu’à 74 %, sans compter les coûts importants associés à son contrôle.
Le choix du traitement contre l’amarante tuberculée
Notre essai démontre que plusieurs stratégies de lutte s’avèrent efficaces contre l’AMATU. Les producteurs devraient choisir le traitement à utiliser en fonction de leur réalité et des objectifs de leur entreprise, tout en considérant les facteurs à prioriser entre le contrôle de l’AMATU, la réduction des indices de risque, l’utilisation des cultures de couverture, la marge brute, etc. Le profil de résistance de l’AMATU doit également être considéré lors du choix de la stratégie de désherbage.
Il est déconseillé de ne considérer que la marge brute lors du choix du traitement. Dans notre essai, la marge brute la plus élevée (3 599 $/ha) était pour le témoin non désherbé en raison de l’absence de dépenses liées au désherbage. Néanmoins, comme mentionné précédemment, le fait de laisser l’AMATU produire des graines ne ferait qu’aggraver la situation pour les saisons futures.
Une solution serait, par exemple, d’utiliser la diméthénamide-P/saflufenacil en PRÉ combinée à un traitement à la tembotrione en POST. Ce traitement a démontré 98,9 % de contrôle, des indices de risque entre faibles et modérés (305 d’IRS et 43 d’IRE), ainsi qu’une marge brute de 3 472,64 $.
Cet exemple démontre que dans la lutte contre l’AMATU, les gains économiques à court terme doivent être repensés, et qu’il est de mise de choisir une méthode de lutte efficace, avec des indices de risque acceptables présentant peut-être des gains économiques plus modestes, mais qui assureront la rentabilité de la ferme à long terme.
1. Financé par le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation dans le cadre du volet 3 du programme Prime Vert et lié à la Stratégie phytosanitaire québécoise en agriculture 2011-2021.