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Les élevages de bovins laitiers sont de grands consommateurs d’eau. Leur offrir une eau de qualité en quantité revêt une grande importance.
« On sollicite de plus en plus l’animal, les éleveurs visent de hauts niveaux de performance. Les producteurs ont des Ferrari entre les mains », lance d’entrée de jeu Patrick Guérin, diplômé en chimie analytique et vice-président du Groupe Guérin, à Sainte-Sabine. Ainsi, depuis les dernières années, on accorde de plus en plus d’importance à l’élément eau dans les élevages. « À la base, on veut une eau potable, il importe donc de faire une analyse bactériologique. Aujourd’hui, c’est une analyse qui va de soi dans les programmes de sécurité à la ferme », indique Patrick Guérin. Par exemple, les producteurs laitiers ont l’obligation d’effectuer une analyse d’eau par année, comme le mentionne le programme Lait canadien de qualité (LCQ).
Un échantillon par an
Le nombre minimum d’analyses est d’une par année. « La période de dégel est un des moments les plus propices à la présence de bactéries. Des entreprises agricoles nous mandatent pour effectuer un contrôle périodique de la qualité de l’eau, d’une à quatre fois par an selon la source d’approvisionnement », souligne Patrick Guérin. Les sources d’approvisionnement peuvent être l’eau souterraine, l’eau de surface, l’eau de rivière, etc. Dépendamment du type d’élevage, la réaction des animaux à une eau contaminée sera plus ou moins rapide. Les truies vont avorter tandis que les poulets vont mouiller leur litière. Pour la vache laitière, il y a une zone grise. « Il est difficile de cerner rapidement le problème avec la vache laitière, car de nombreux facteurs interviennent, comme la présence de toxines dans les fourrages. La diarrhée peut être un symptôme d’une eau contaminée au même titre qu’un fourrage de mauvaise qualité », mentionne M. Guérin.
Les causes de contamination
Parfois, la contamination de l’eau provient du réseau de distribution dans le bâtiment. « Il peut s’agir d’un réseau mal entretenu ou dont la tuyauterie contient de l’acier, un matériau inadéquat pour le transport de l’eau », donne en exemple Patrick Guérin. D’autres situations, notamment la contamination de puits artésiens, sont beaucoup moins fréquentes et relèvent plus d’une contamination par manipulation. Cependant, l’infiltration d’eau contaminée est possible dans les vieux puits souvent mal scellés. « Dans ces cas-là, c’est assez simple de vérifier si la cause de la contamination provient d’une infiltration d’eau », souligne M. Guérin. Il faut alors remédier aux problèmes et stériliser le puits. « On rencontre des problèmes de contamination de plus en plus fréquemment dans les réserves d’eau. Les producteurs installent des réservoirs ou citernes de grande capacité pour accumuler de l’eau. Malheureusement, ils oublient d’en faire l’entretien », affirme Patrick Guérin. Les réservoirs utilisés doivent être stérilisés périodiquement, sans quoi les bactéries s’accumulent. L’automatisation de l’entretien de ces réservoirs est possible. Il existe des systèmes de stérilisation comme le réacteur ultraviolet ou des systèmes d’injection de stérilisants au chlore, à l’iode ou au peroxyde d’hydrogène.
Élément clé de la production laitière : l’eau
De l’eau, Michel Lemire, de la Ferme Nic et Pic à Saint-Zéphirin-de-Courval, en puisait abondamment de son puits artésien : « Dans la région, la nappe phréatique est profonde. Il y avait de l’eau en quantité, mais elle n’était pas de qualité. Même à la maison, on devait acheter de l’eau embouteillée pour la cuisine, entre autres. »
Il y a une dizaine d’années, en plein mois de janvier, la pompe du puits se brise. Le producteur se débrouille pendant trois semaines en se faisant livrer de l’eau par citerne. Au même moment, un changement important s’opère : la production laitière augmente. Michel Lemire entame alors des démarches pour s’approvisionner directement du réseau d’aqueduc de Nicolet, situé à 17 km de chez lui. Des municipalités avoisinantes, dont Saint-Zéphirin, négocient également avec la Ville de Nicolet pour offrir de l’eau de qualité à leur citoyen. Finalement, le réseau d’aqueduc passera à quelque trois kilomètres de sa ferme. Michel Lemire investit pour se brancher au réseau : « À partir de cet instant, les vaches se sont mises à boire. Notre production a augmenté de 800 litres par an par vache. »
Depuis, d’autres améliorations ont été apportées comme l’installation, il y a deux ans, d’un échangeur à plaques. Lors de la traite, l’échangeur à plaques permet d’abaisser la température du lait avant son déversement dans le réservoir réfrigéré. En plus des économies d’énergie (diminution de l’utilisation du compresseur) et de l’augmentation de la qualité du lait, l’eau froide qui circule entre les plaques d’acier inoxydable gagne en température. Cette eau tempérée est mise en réserve et sert à l’abreuvement des vaches laitières. « Et elles préfèrent une eau dégourdie », indique M. Lemire.
Les besoins journaliers en eau d’une vache en lactation tournent autour de 125 litres; en pleine canicule la consommation sera encore plus grande. C’est pourquoi on recommande un débit minimal à l’abreuvoir de 12-15 l/min. « Avec le puits, le débit atteignait 7-8 l/min, c’était nettement insuffisant », constate aujourd’hui Michel Lemire.
À Saint-Valère, Marc Giroux, de la ferme Kalexastar, a rénové son étable et investi dans l’amélioration de la qualité de l’eau. « Lors des travaux, on s’est aperçu que tous les tuyaux étaient colmatés avec des résidus de fer et de manganèse. Dans les tuyaux de ¾ pouce de diamètre, il ne restait pratiquement plus d’espace pour l’eau, à peine la grosseur d’un petit doigt », relate Marc Giroux. Ainsi, le débit était insuffisant dans les buvettes. Pour corriger ce problème, le producteur a grossi le diamètre des tuyaux à 1 ¼ pouce. Tous les abreuvoirs ont aussi été changés (voir l’encadré : Choisir ses abreuvoirs). « Aujourd’hui, le débit de l’eau dans les abreuvoirs atteint 22 l/min; les vaches ont de l’eau en quantité. En cinq mois, la moyenne de production de lait par vache a fait un bond de 10 200 à 10 800 l », illustre Marc Giroux. Évidemment, une part de cette augmentation est due au bon approvisionnement en eau, mais le producteur a également amélioré le confort des vaches, notamment la ventilation et l’éclairage.
En rénovant, Marc Giroux a revu entièrement l’aménagement de la laiterie de façon à réduire la facture énergétique et en a profité pour installer deux entrées d’eau distinctes, « une pour la laiterie et une autre pour l’abreuvement des animaux », décrit le producteur. L’eau nécessaire au nettoyage des équipements de traite provient de la maison où elle est filtrée et adoucie. Le producteur utilise cette eau traitée pour refroidir le compresseur du réservoir à lait. L’eau préchauffée est ensuite entreposée dans trois réservoirs en prévision du lavage : deux réservoirs la maintiennent tiède tandis que le troisième est un chauffe-eau.
Le producteur réalise d’autres économies d’énergie grâce à un échangeur à plaques. L’eau, provenant de la deuxième entrée d’eau, circule à contre-courant avec le lait chaud (36 °C) entre des plaques d’acier inoxydable. Il se produit un transfert de chaleur entre les liquides; la température du lait baisse de 15 à 20 °C tandis que l’eau gagnera quelques degrés. L’eau tempérée est mise dans un réservoir de 545 litres (120 gallons). Par ailleurs, l’eau qui circule dans l’échangeur à plaques passe dans deux filtres, un pour le fer et l’autre pour le manganèse : « Je voulais éviter de colmater l’échangeur à plaques. En la filtrant, on retire le fer et le manganèse. De plus, une forte odeur s’en dégageait. Une fois filtrée, elle est pratiquement inodore. » Les filtres n’exigent aucun entretien journalier; leur durée de vie serait de 7 à 8 ans. Les 545 litres d’eau en réserve servent ainsi à abreuver les vaches.
Autant à la Ferme Nic et Pic qu’à la Ferme Kalexastar, les producteurs laitiers réalisent pleinement l’importance de fournir une eau de qualité, mais également en quantité à leurs bovins laitiers. « Souvent, ces sont de petits détails nécessitant peu d’investissements, comme changer le diamètre de la tuyauterie et s’assurer d’avoir un débit d’eau suffisant à l’abreuvoir, qui font une grande différence dans la performance des animaux », souligne Marc Giroux. Le principe de base est simple, lorsqu’une vache a soif et se lève pour boire, l’eau doit être disponible en quantité. Car après quelques minutes, peu importe le volume d’eau ingérée, elle s’arrêtera pour se coucher. Dans un court laps de temps, une vache ne se relèvera pas pour boire de nouveau afin de compenser une faible consommation d’eau. « L’eau est un élément essentiel. En offrant plus de confort aux animaux et de l’eau en quantité, on augmente la productivité », conclut Michel Lemire.