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L’agricultrice Johanne Pagé, de Lanaudière, résume bien le bilan québécois de la récolte 2022 de soya : « C’est vraiment une récolte bizarre cette année, vraiment variable. J’ai eu du 3 tonnes à l’hectare (t/ha) dans un champ et 0,5 dans le champ d’en face! On a eu, au printemps, des vents extrêmement forts, beaucoup de pluie, du froid, un cocktail qui ne nous a pas aidés. »
« J’ai remarqué que la levée a été meilleure dans les champs qui avaient reçu un coup de vibro, comparativement à ceux en semis direct », souligne-t-elle. Dans la même région, le producteur sous régie biologique Sylvain Raynault estime que sa récolte de soya est à 20 % sous sa moyenne habituelle. « Il y a eu trop d’eau par moment. Le soya a stallé et les pucerons l’ont mangé. Et quand ça arrive en bio, sans insecticides, tu le regardes se faire manger », témoigne-t-il sans trop s’en faire, puisque ses autres récoltes ont été bonnes.
De bons résultats en Montérégie
Après deux années difficiles, Alain Gervais, de l’est de la Montérégie, se réjouit de sa récolte 2022 de soya. « Sur les 400 hectares de soya que je bats, la moyenne est légèrement au-dessus de 4 t/ha. Le record est chez l’un de mes clients, une moyenne de 4,4 t/ha sur 26 ha. Le secret? C’est d’avoir un bon forfaitaire pour faire ses travaux », dit-il à la blague. Plus sérieusement, il explique ce résultat par les précipitations qui n’ont pas été excessives dans son secteur et par un dépistage rigoureux des pucerons qui a mené au traitement d’une majorité de ses champs. « On a fait le test dans un champ non traité qui aurait dû l’être, et on avait 0,7 t/ha de moins à l’hectare. »
Dans l’ouest de la Montérégie, Pierrick Gripon ne se plaint pas de sa récolte, lui qui a obtenu son record dans le soya génétiquement modifié avec 4,22 t/ha. Son rendement dans le soya IP pour consommation humaine est très bon, avec 3,48 t/ha, mais inférieur à sa marque de l’an dernier. « Dans l’IP, le résiduel [herbicide] a fait figer le soya. C’est comme une chimiothérapie. C’est pour son bien, mais ça lui a fait mal, au soya », analyse celui qui cultive plus de 700 hectares de soya.
Dans le Centre-du-Québec, l’agronome et agriculteur Alexandre Couture constate une grande variation allant de 0,7 à 4 t/ha. Les champs semés un peu tard, ceux en semis direct et ceux arrosés avec des herbicides résiduels, qui ont occasionné un stress accru à la plante et l’ont rendue plus vulnérable aux pucerons, ont connu de faibles résultats. Par contre, des cultures dans des sols lourds et fertiles ont eu d’excellents résultats.
Au Lac-Saint-Jean, l’agriculteur Pierre Murray dit que le soya est la pire culture de l’année pour plusieurs producteurs, avec des rendements nettement sous la moyenne habituelle, qui ont même conduit à quelques abandons de cultures.
Au Témiscamingue, le producteur et commerçant Danik Sarrazin assure lui aussi que la récolte de soya est mince dans sa région, avec près de 1,7 t/ha, soit d’environ 30 % inférieure à leur moyenne.
Le soya du Québec en Iran Le soya est principalement une culture d’exportation pour les producteurs québécois. Si l’Europe représente la principale destination des récoltes, avec près de 128 M$ de soya exporté en 2021, l’Indonésie arrive deuxième, avec une valeur de 119 M$, tout juste suivie par… l’Iran, qui a acheté pour 114 M$ de soya du Québec. « Quand on a perdu le marché chinois en raison des tensions politiques, on a gagné l’Iran. Il y a une grande usine de trituration là-bas. La demande de l’Iran pour le soya destiné à l’alimentation des poules est aussi très forte », explique Brian Innes, directeur de l’organisme Soy Canada, une association canadienne qui regroupe des producteurs et commerçants de soya. Bien que la Chine soit redevenue un acheteur important pour le soya canadien, M. Innes mentionne que ce marché est incertain et qu’il faut la collaboration du gouvernement canadien pour développer des marchés qui amènent plus de valeur aux producteurs et aux exportateurs. Il vise le marché de la région indopacifique, donnant en exemple les Philippines, où les aliments à base de soya ont connu une croissance annuelle de 12 % au cours des cinq dernières années. |