International 10 février 2023

Le bilan des récoltes de 2022

Les mois d’hiver sont généralement une période d’accalmie. C’est un moment idéal pour prendre le temps de réfléchir à sa stratégie de commercialisation. L’analyse de la récolte des principaux pays producteurs de grains permettra alors d’évaluer la tendance des marchés.

États-Unis

La récolte aux États-Unis s’est avérée décevante en dépit de l’absence d’événements météo majeurs dans le Midwest. Selon le département de l’Agriculture des États-Unis (USDA), les récoltes ont reculé de 8 % pour le maïs, de 3 % pour le soya et de 0 % pour le blé, par rapport à l’an passé, pour se situer respectivement à 353,8 millions de tonnes (Mt), 118,3 Mt et 44,9 Mt. Cette réduction de la production provient en partie de la diminution des superficies ensemencées, et ce, malgré des prix historiquement élevés : les superficies ensemencées des trois principales cultures de grains ont fléchi de 5,4 millions d’acres (Ma) pour s’établir à 221,8 Ma.

Europe

Malgré une sécheresse qui a durement frappé la France, l’Union européenne a su tirer son épingle du jeu en obtenant une bonne récolte de blé de 134,3 Mt, ce qui représente une baisse de 3 % comparativement à l’année dernière. Cependant, la culture de maïs n’a pas été aussi chanceuse et sa production a chuté de 24 % pour se situer à 54,2 Mt.

Russie et Ukraine

La récolte de 2022 en Ukraine a été la première à subir de plein fouet les impacts considérables de la guerre. Les récoltes ont chuté de 38 % pour le blé et de 36 % pour le maïs, pour se situer respectivement à 20,5 Mt et 27 Mt. Les conséquences de la guerre ont été unilatérales en termes de production agricole, la Russie n’ayant pas souffert d’une perte de production. Au contraire, elle a connu sa meilleure récolte de blé, évaluée à 91 Mt.

Australie

La production australienne connaît un retour du balancier, car l’Australie a obtenu une excellente récolte pour une troisième année consécutive à la suite de trois années de misère causée par la sécheresse. D’ailleurs, la production de blé pourrait s’avérer un record, à 36,6 Mt.

Canada et Québec

Les récoltes de céréales et de canola au Canada se sont nettement améliorées par rapport à l’année dernière, ce qui n’est nullement surprenant étant donné la sécheresse majeure qui avait frappé l’Ouest canadien en 2021. La récolte de blé s’est d’ailleurs accrue de 52 % pour se situer à 33,8 Mt. Le Québec a connu une croissance plus modérée de sa production avec une hausse de 4 % pour le maïs, de 2 % pour le soya et de 1 % pour le blé, pour s’établir respectivement à 3,6 Mt, 1,1 Mt et 347 135 tonnes.

Récoltes à prévoir

Les récoltes de l’hémisphère nord à peine terminées, les marchés se sont déjà tournés vers l’Amérique du Sud. Le Brésil est en voie de récolter une production record de soya à 152 Mt, ce qui serait un bon signe pour la culture de maïs safrinha, qui suit celle du soya et qui représente environ 75 % de la production totale de maïs. Pour l’instant, l’USDA prévoit la récolte de maïs à 126 Mt. En Argentine, la situation est plutôt inquiétante à cause d’une sécheresse qui risque d’affecter négativement le rendement. Néanmoins, l’USDA n’a toujours pas ajusté ses estimations de la production. Celles-ci sont établies à 55 Mt de maïs et 49,5 Mt de soya, soit un niveau supérieur à la moyenne des cinq dernières années.

En plus de l’état des récoltes dans le monde, la demande en grains sera à surveiller en 2023, notamment celle de la Chine, devenue la principale importatrice de grains oléagineux et fourragers de la planète. La situation en Chine est particulièrement inquiétante pour les marchés étant donné la remontée importante du nombre de cas de COVID-19 qui affecte directement la demande en viande et en huile, et donc, indirectement, la demande en grains. Or, le président chinois Xi Jinping est tiraillé entre deux exigences : protéger sa population inadéquatement vaccinée et satisfaire ses citoyens mécontents des mesures de confinement musclées et de la croissance économique fortement ralentie par sa politique « zéro COVID ». 

Étienne Lafrance, agent d’information sur les marchés, Producteurs de grains du Québec


Cet article a été publié dans le cahier Grains de janvier 2023.