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Alors que l’art de la fauconnerie gagne tranquillement en popularité au Québec, quelques agriculteurs utilisent des oiseaux de proie pour protéger leurs récoltes contre les ravageurs.
SAINT-PIE — Jeannine Messier, de la Ferme Équinoxe, a décidé de protéger autrement ses bleuets contre les oiseaux gourmands. Fini les filets, « c’est trop d’ouvrage ». La productrice compte désormais sur Edwige, une buse de Harris mâle âgée de trois ans. L’utilisation de tels rapaces en agriculture demeure marginale, mais efficace.
Après avoir envisagé les autres moyens d’effarouchement comme les canons et les épouvantails, qui sont selon elle peu utiles, l’agricultrice a décidé de demander l’aide d’un fauconnier. «
Mais c’était hors de prix. Ça “mangeait” toute ma saison de bleuets seulement de le faire venir ici », explique-t-elle.
Marc-André Fortin, fauconnier et président du Groupe Prévost-Fortin, une société spécialisée dans le contrôle aviaire, a déjà été appelé en renfort dans des champs de petits fruits. « Ça fonctionne bien, mais les gens ont souvent la pensée magique. Ils pensent qu’on vient porter l’oiseau, qu’on s’en va et que c’est correct pour la saison. Ça ne fonctionne pas comme ça », prévient-il.
Devant les coûts élevés reliés à la présence quotidienne d’un dresseur d’oiseau de proie à sa ferme, Jeannine Messier a décidé de se secouer les plumes. Si son budget ne lui permettait pas de faire appel à un fauconnier, elle allait suivre un cours pour en devenir un.
Difficile de voler de ses propres ailes
L’agricultrice de Saint-Pie a donc suivi un cours de 30 heures lui permettant d’obtenir le permis légal nécessaire à la garde en captivité de sa buse. Depuis 2002, le ministère des Ressources naturelles et de la Faune du Québec autorise l’élevage d’oiseaux de proie. Il faut avoir suivi 15 heures de formation pour obtenir un permis d’apprenti fauconnier (qui permet la garde d’un seul oiseau) et une formation de 30 heures pour le permis de fauconnier (aucune limite d’oiseau).
Ces normes font sourciller Marc-André Fortin, qui croit qu’elles ne sont pas assez sévères. « Ça prend à mes employés un entraînement de 20 à 30 heures par semaine de février à octobre pour être à l’aise. » Et davantage pour un faucon, qui demande selon lui énormément d’habileté.
Jeannine Messier admet qu’Edwige lui a donné un peu de fil à retordre à la première saison, en 2011. « J’avais peur de le perdre, raconte-t-elle. Je n’étais pas prête à le laisser voler librement. » Petit à petit, l’oiseau fait son nid, et dorénavant l’agricultrice semble tout à fait à l’aise de lancer Edwige au-dessus de sa bleuetière. Elle le sort d’ailleurs une à deux fois par jour durant l’été.
Elle reconnaît perdre davantage de bleuets que si elle avait installé ses filets, mais ne s’en formalise pas. Elle estime que son animal lui permet de sauver la moitié des petits fruits qu’elle aurait perdus sans aucune protection. « Et de faire voler un oiseau, c’est malade! C’est un vrai trip! » s’enthousiasme-t-elle. Marc-André Fortin croit, quant à lui, que pour une intervention plus efficace, il faudrait faire voler au moins une buse et un faucon. Si Jeannine Messier fait figure d’oiseau rare dans le domaine, M. Fortin espère que l’art de la fauconnerie sera bientôt davantage au service de l’agriculture.