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Le temps des sucres termine sa course folle dans le sud du Québec. La saison record dans plusieurs cabanes a fait vivre des nuits blanches à de nombreux guerriers et guerrières des sucres. Une situation attendue avec impatience par les acériculteurs situés dans les régions les plus froides. Voici le quatrième compte-rendu de la saison des cinq érablières suivies par La Terre.
Sandra Gaudet, Témiscamingue
Fin de l’entaillage : 15 mars
Premier bouillage : 21 mars
Objectif de rendement : 4 lb/entaille
Rendement en date du 7 avril : 1 lb à l’entaille
Nombre d’entailles : 600
Au Témiscamingue, Sandra Gaudet et son conjoint venaient de produire 86 litres de sirop au moment de l’entrevue, ce qui porte leur total à 206 litres. « Il manque “juste” 600 litres pour atteindre nos objectifs », affirme la copropriétaire de l’Érablière les petits doigts collants. « On est en train de bouillir, mais on pensait que ça coulerait plus que ça aujourd’hui. Depuis deux semaines, on n’a pas eu de grosses coulées, mais au moins, c’était constant. Ce n’est pas fini. Ça gèle encore et le jour, ça se tient à 3 ºC », partage l’acéricultrice. Elle précise que les pieds des arbres ne sont pas encore dégagés et près de 60 cm de neige couvre encore le sol. « Le sirop pâlit et il sent très bon! On va souhaiter que ça s’étire encore pendant un bout », dit-elle.
Zoé Bisaillon, Montérégie
Fin de l’entaillage : 16 février
Première évaporation : 12 février
Objectif de rendement : 4,5 lb/entaille
Rendement en date du 7 avril : 4,58 lb à l’entaille
Nombre d’entailles : 8 500
« Il n’en reste plus gros de la saison. J’ai déjà atteint mon objectif de 4,58 lb/entaille. On n’a pas chômé! Les températures étaient exceptionnelles. Ça gelait une nuit et le lendemain, il faisait chaud. Ça coulait beaucoup et ça continuait de couler le soir et encore le surlendemain. Depuis deux semaines, ça n’a pas arrêté. C’était intense. Tous les jours, on bouillait. J’avais hâte d’avoir un break. Aujourd’hui, c’est plus tranquille et on n’est pas déçus que ça commence à ralentir », partage Zoé Bisaillon, d’Acton Vale. Le sirop produit est bon, ce qui contribue à soutenir le moral des troupes. Et évidemment, tant que le goût du sirop sera au rendez-vous, l’acéricultrice et son père continueront à récolter l’eau que fourniront les arbres. Une panne de courant en pleine coulée a apporté un peu de stress. Heureusement qu’une génératrice était à leur disposition. « Nous avons aussi eu quelques problèmes avec le système de détection de fuites. On ne voyait plus rien sur l’écran. Nous n’avons pas perdu d’eau, mais c’était dérangeant », raconte-t-elle. Zoé Bisaillon note aussi une quantité plus élevée qu’à l’habitude de pierre de sucre dans les casseroles, l’obligeant à consacrer plus de temps au nettoyage. À cela s’ajoute sa clientèle qui appelle pour obtenir du sirop et des produits transformés. « Ça ne lâche pas. Les gens viennent. Il faut transformer chaque jour », décrit-elle.
David Bolduc, Chaudière-Appalaches
Fin de l’entaillage : 19 février
Première évaporation : 23 février
Objectif de rendement : 7,5 lb/entaille
Rendement en date du 7 avril : 5,9 lb à l’entaille
Nombre d’entailles : 3 225
David Bolduc était en train de bouillir au moment de l’entrevue le 7 avril au soir. « On a eu une semaine de fou! C’était des grosses coulées, tous les jours. Je n’ai pas vu ça souvent, autant de grosses coulées en ligne comme ça. C’est le fun. On en prendrait chaque année! », dit-il avec enthousiasme. Du même souffle, il ajoute : « Le sirop est beau et il est bon. C’est extraordinaire! » L’acériculteur est à l’apogée de sa saison des sucres, lui qui qualifie le goût du sirop de succulent en termes de saveur d’érable. La couleur du sirop est dorée. Chaque jour, il a reçu près de 18 000 litres d’eau d’érable. Par chance, il compte sur Mado, sa grande partner de bouillage. « C’est elle qui s’occupe de l’évaporateur depuis cinq ans. Elle est attentionnée. C’est la meilleure pour bouillir et pour… faire du gin avec du réduit aux invités! », confie avec humour M. Bolduc. L’eau d’érable commence à être légèrement moins sucrée, à 2,3 degrés Brix. « Mais il n’y a pas de signe de sève, et même s’ils n’annoncent plus trop de gelées, je suis confiant qu’on pourra continuer », analyse celui qui exploite 3 225 entailles à Saint-Jacques-de-Leeds.
Bianka Pagé, Mauricie
Fin de l’entaillage : 25 février
Première évaporation : 24 mars
Objectif de rendement : 4 lb/entaille
Rendement en date du 7 avril : 1,5 lb à l’entaille
Nombre d’entailles : 4 000
Bianka Pagé n’avait pas la voix aussi animée qu’à l’habitude. Les érables n’ont pas encore livré de grandes quantités d’eau et la neige qui tombait à plein ciel ne lui apportait qu’un brin de désespoir. « Ça coule un peu, mais ce n’est pas ce qu’on espérait. En fait, nous avons eu deux jours et demi de bonnes coulées. Sinon, rien d’énorme. C’est quand même inquiétant. Nous avons encore près de 60 cm de neige au sol, avec un cerne de glace autour des pieds des arbres. Je commence à y croire de moins en moins, d’atteindre mon objectif [de 4 lb/entaille] », indique la copropriétaire, avec son conjoint, de l’Érablière Pagé-Savard et Filles à Saint-Alexis-des-Monts. Il y a quand même du positif; le sirop qu’elle produit jusqu’à maintenant est d’une excellente qualité, constate-t-elle. « Je suis bien fière du goût qu’on produit. Ce n’est peut-être pas éligible pour une distinction Grand or [au concours de la Grande sève], mais d’après moi, une or, oui », anticipe-t-elle. Bianka tourne les yeux sur les prévisions météo qui annoncent une semaine propice aux coulées d’eau d’érable. Elle espère que la nature sera généreuse et prolongera le temps des sucres.
Wesley Levasseur, Bas-Saint-Laurent
Fin de l’entaillage : 11 mars
Première évaporation : 21 mars
Objectif de rendement : 5 lb/entaille
Rendement en date du 7 avril : 0,5 lb à l’entaille
Nombre d’entailles : environ 200 000
« Là, ça commence! » lance avec joie Wesley Levasseur, qui exploite avec sa famille 200 000 entailles à Saint-Athanase. « Nous avons eu nos premières vraies coulées cette semaine. L’eau est sucrée. On a produit une quarantaine de barils par jour. Ce n’est pas énorme, mais c’est régulier. Et le sirop est bon. Ça sent super bon dans la cabane. Ça crée un rythme. Ça nous met en appétit. On en profite pour se préparer aux grosses coulées qu’on devrait avoir la semaine prochaine », dépeint M. Levasseur. Ce dernier remarque que l’absence de pluie et le faible niveau de fonte de l’épaisse couche de neige privent les érables d’eau. Il se surprend de constater encore jusqu’à 120 cm de neige par endroits. Des acériculteurs environnants ont pelleté beaucoup, témoigne-t-il. « Il n’y a pas tant d’eau dans la terre. Ça met plus d’air dans le réseau et ce n’est pas à cause de problèmes d’entaillage ou de fuites. C’est un phénomène qu’on observe une à deux fois durant le printemps », explique-t-il. Parlant de fuites, les attaques de sa fameuse horde d’écureuils sur son réseau de tubulure ont diminué considérablement. La situation est sous contrôle, se réjouit-il. Et les prévisions météo annoncent des températures plus chaudes qui le rendent optimiste. « On a encore une chance de faire un très bon printemps », estime M. Levasseur.