Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
Régulièrement, de nouveaux insectes et de nouvelles plantes envahissantes apparaissent, devenant ainsi les nouveaux ennemis des agriculteurs. Voici ce qu’il faut avoir à l’œil.
Fulgore tacheté
Le fulgore tacheté cause beaucoup d’inquiétude au sein de la communauté scientifique, soutient Olivier Morin, biologiste aux enquêtes phytosanitaires à l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA). Cet insecte polyphage originaire d’Asie peut causer beaucoup de dommages aux vignes et aux arbres fruitiers. « Les essaims de fulgores sucent la sève des plantes hautes, ce qui les affaiblit. De plus, ils sécrètent beaucoup de déjections qui tombent sur la plante, causant des moisissures », explique-t-il.
Observé pour la première fois en Amérique du Nord en 2014, le fulgore tacheté est aujourd’hui présent dans 13 États américains, dont celui de New York, limitrophe à l’Ontario et au Québec. « Il n’est pas encore présent dans la province, mais il s’en approche. Deux spécimens morts ont été retrouvés tout près de la frontière en 2020, précise Jean-Philippe Légaré, biologiste entomologiste au ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec. Il se propage en volant, mais aussi en pondant ses œufs sur du matériel à la surface rugueuse comme des briques de même que sur des véhicules. Il peut alors être transporté sur de grandes distances par l’humain. »
Le fulgore adulte est facilement reconnaissable à ses ailes colorées de rouge, de noir et de blanc. Son abdomen est jaune avec des rayures noires.
« Les Américains déploient beaucoup d’efforts pour essayer de contrôler sa propagation, soutient Olivier Morin. Ils ont mis en place un groupe de travail technique. Parmi les pistes de solutions, il y a l’utilisation de pesticides à large spectre. L’intégration de prédateurs spécifiques qui ne nuiraient pas aux cultures est également à l’étude. » En attendant, la vigilance est de mise.
Anthonome du fraisier
Ce minuscule charançon peut faire de gros dommages sur les fraisiers et les framboisiers. Il s’attaque aux boutons floraux, causant une perte de productivité des cultures.
Observé pour la première fois en Colombie-Britannique en 2019, il est aujourd’hui bien établi sur tout le territoire. Il n’est pas encore présent au Québec. « Ici, nous avons l’anthonome de la fleur du fraisier qui cause sensiblement les mêmes dommages. Mais comme c’est une espèce indigène, cet anthonome a ses ennemis naturels, qui exercent un certain contrôle. Ce n’est pas le cas de l’anthonome du fraisier », explique Jean-Philippe Légaré.
Il est difficile de différencier les deux petits insectes qui mesurent entre deux et quatre millimètres. L’anthonome du fraisier est noir mat, alors que son cousin est de couleur brun pâle à noir.
Ver-gris moissonneur
Les hivers doux et les printemps hâtifs et secs des dernières années ont contribué à la prolifération de ce ravageur qui infeste les cultures fruitières et maraîchères. « Phénomène nouveau, il s’attaque aussi aux fourrages et au maïs-grain », souligne Jean-Philippe Légaré.
Après avoir séjourné dans le sol, les œufs de cette espèce éclosent au printemps. « Les semences constituent une belle nourriture fraîche pour le ver-gris. Il sort la nuit pour se nourrir et coupe le plan au niveau du sol, causant d’importantes pertes pour le producteur. C’est pourquoi il est important de faire un dépistage aux champs dès les premières chaleurs », recommande-t-il. Un agronome pourra conseiller les meilleures méthodes pour lutter contre ce ravageur selon le degré d’infestation des cultures.
Attention à la tache goudronneuse du maïs
Cette maladie a été détectée récemment en Ontario où elle a causé des pertes de rendement importantes. Ce n’est donc qu’une question de temps avant qu’elle ne se déplace vers le Québec, selon Jean-Philippe Légaré.
La tache goudronneuse est causée par un champignon qui crée de petits points noirs boursouflés à la surface des feuilles. « Elle est souvent confondue avec la rouille commune du maïs. Il faut donc être vigilant en raison des dommages importants qu’elle peut causer et de sa prolifération au Québec », précise-t-il.
Des mauvaises herbes à contrôler
L’amarante tuberculée n’est pas nouvelle, mais elle se propage rapidement. « C’est la super mauvaise herbe qu’il est important de détecter », selon Jean-Philippe Légaré. Elle peut survivre pendant plusieurs années dans le sol avant de s’attaquer aux cultures de maïs et de soya. Elle a aussi développé une résistance aux herbicides. Actuellement, il y a 43 foyers d’infestation répertoriés au Québec dans plusieurs régions.
Une lutte intégrée est nécessaire pour contrôler cet ennemi coriace. « Il faut les bons herbicides et des mesures de biosécurité pour s’assurer de ne pas affecter les champs à proximité », dit-il.
Le kochia à balais est une nuisance pour les cultures d’avoine, de blé, de fourrages, etc. Il a fait une première apparition dans un champ de maïs en Montérégie-Est en 2020. On le retrouve aussi en bordure des routes. Cette mauvaise herbe venue de l’Ouest canadien est des plus coriaces à cause de ses racines profondes, résistantes à de nombreux herbicides. Pour prévenir sa prolifération, des mesures de biosécurité à la ferme s’imposent. Il faut porter une attention particulière aux bords des chemins de ferme, les plants qui s’y trouvent pouvant contribuer à sa dispersion.
Présent au Canada depuis les années 1800, l’ailante glanduleux a donc eu le temps de s’implanter dans plusieurs provinces, dont l’Ontario et le Québec. Cet arbre d’ornement, qui peut atteindre jusqu’à 30 mètres, est d’autant plus à surveiller qu’il est l’hôte favori du fulgore tacheté dont il est fait mention plus haut. « Il facilite l’introduction de cet insecte nuisible en étant un réservoir de reproduction », explique Olivier Morin.
Grâce à sa croissance rapide, l’ailante glanduleux a tendance à dominer les sites où il s’établit, ne laissant aucune chance aux autres végétaux de croître. Il est donc préférable d’envisager son retrait pour limiter sa dispersion et celle du fulgore tacheté.
À mettre également sur son radar, l’égilope cylindrique, une plante envahissante qui rivalise avec les cultures – dont le blé –, réduisant par le fait même la qualité et le rendement des récoltes. « Elle est difficile à identifier parce qu’elle ressemble au blé, souligne M. Morin. Elle s’introduit dans les champs grâce aux semences contaminées ou à l’aide de la machinerie agricole. Elle est considérée comme une des mauvaises herbes les plus difficiles à contrôler avec des herbicides. Des précautions s’imposent donc pour ne pas la propager. »
Sylvie Lemieux, collaboration spéciale