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Les 43 propriétaires dont les terres seront traversées par la future voie de contournement ferroviaire de Lac-Mégantic en Estrie jugent décevantes les offres d’acquisition proposées par Transports Canada.
Dans la municipalité de Frontenac, le producteur forestier Kurt Lucas s’est fait offrir 355 $ par année pour louer au ministère un tronçon de terre d’un hectare. « C’est ridicule, frustrant, fâchant », dit-il. Le producteur embauchera des experts à ses frais pour effectuer une contre-expertise et contester l’offre du gouvernement. « Je leur ai dit que ce qu’ils m’avaient envoyé ne valait pas grand-chose parce que j’ai besoin d’un droit de passage », affirme M. Lucas. Sans droit de passage, le producteur serait contraint de faire un détour d’un kilomètre pour accéder à 40 hectares de terres boisées sur 50 au total. Ce dernier précise que les pages référant au droit de passage dans l’offre gouvernementale sont vides. « J’ai vérifié avec [mes voisins] et c’est pareil », indique le producteur.
Les offres de gré à gré sont très variables, précise le directeur du Syndicat des Producteurs forestiers du sud du Québec, Martin Larrivée, qui collabore étroitement avec la fédération régionale de l’Union des producteurs agricoles (UPA) en Estrie. L’organisation a représenté 33 producteurs agricoles et forestiers sur les 43 propriétaires lors des audiences de la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) en 2020 et suit de près l’évolution du dossier. « Certaines [offres] sont acceptables, surtout en zone blanche, parce qu’elles ont été considérées comme terrain résidentiel et la compensation est plus substantielle, mais dans la zone verte, c’est proche de la valeur municipale des terres ou un peu plus. Plusieurs propriétaires sont déçus des offres reçues », rapporte M. Larrivée, en précisant que plusieurs n’accepteront pas les offres dans ces conditions.
Au Tribunal administratif depuis un an
La fédération régionale de l’UPA plaide devant le Tribunal administratif du Québec que la CPTAQ a commis des erreurs en novembre 2020 en autorisant le projet de Transports Canada sans conférer une servitude de passage perpétuelle aux producteurs agricoles et forestiers, dont les terres seraient scindées par la voie ferrée.
L’UPA estime que la Loi sur les transports au Canada, qui régit habituellement les droits de passage, ne protège pas suffisamment les producteurs agricoles dans le cas du démantèlement de la voie ferrée et de sa vente à une entreprise n’appartenant pas au domaine du transport. L’avocat qui représente la Fédération de l’UPA de l’Estrie, Me Rémi Jolicoeur, cite en exemple une voie ferrée vendue à un club de motoneigistes dans Chaudière-Appalaches, qui chargeait des frais déraisonnables aux producteurs devant la traverser pour atteindre une partie de leurs champs ou de leurs boisés. « La CPTAQ a répondu qu’en vertu de la loi, c’est suffisant à court terme, et les propriétaires sont libres de vendre [les portions de terres où passera la voie ferrée à Transports Canada] et de mettre leurs conditions, puis que s’ils ne sont pas d’accord avec les conditions, ils n’ont qu’à ne pas vendre », explique Me Jolicoeur. Or, devant le Tribunal administratif, l’avocat plaide depuis décembre 2020 que Transports Canada peut user de la loi fédérale pour exproprier les producteurs qui refuseraient de vendre. C’est la principale erreur commise par la CPTAQ, selon lui.
L’avocat souhaite faire témoigner un représentant de Transports Canada au procès, ce que conteste le procureur général du Canada. Cette question sera tranchée devant le Tribunal le 6 avril prochain, puis une date d’audience, concernant cette fois la révision de la décision de la CPTAQ, pourrait être fixée à l’été.