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La saison des sucres est lancée à quelques endroits, sans grandes coulées. Mais fidèle à son habitude des dernières années, La Terre suit la production de sirop d’érable de cinq producteurs et productrices acéricoles situés aux quatre coins du Québec. Nous ferons régulièrement le point sur l’évolution de leur saison en commençant cette semaine par un portrait de l’entreprise de chacun.
Zoé Bisaillon, Montérégie
Début de l’entaillage : 16 février
Première évaporation : 12 février
Objectif de rendement : 4,5 lb/entaille
Nombre d’entailles : 8 500
Zoé Bisaillon a déjà lancé sa saison en allumant son évaporateur au bois le 12 février. « Nous avons eu deux coulées, rien de gros, mais cela a donné 3,5 barils de sirop », indique celle qui travaille pour la première fois à temps plein pour l’érablière familiale qu’elle vient d’acquérir. « Mes parents ont l’érablière depuis 1997 et nous avons terminé la transaction l’automne dernier. Je me suis promenée pas mal, mais toujours dans l’idée de revenir prendre la relève de l’érablière. Là, on s’est établis ici pour la vie », dit Mme Bisaillon, qui travaillait pour la Banque de Montréal avant d’effectuer un retour avec son conjoint à Acton Vale, en Montérégie, où se trouvent les 8 500 entailles. Diplômée en gestion à l’université, elle a toujours pris part aux sucres et au travail en forêt. Aujourd’hui, c’est elle qui entaille les érables, qui recherche les fuites dans le système de tubulure et qui s’occupe de bouillir avec son éternel acolyte, son père. Son conjoint s’occupe plutôt de la transformation du sirop en une large déclinaison de produits, de la barbe à papa jusqu’à la moutarde à l’érable, au gin à l’érable, etc. « Ici, nous inversons les rôles. C’est moi qui suis dans le bois et mon chum à la transformation », dit l’acéricultrice de 37 ans. L’érablière est à jour, assure-t-elle. Son père ayant été vendeur d’équipement acéricole pendant plusieurs années, il a toujours maintenu les installations à niveau. « On s’améliore d’année en année. J’aimerais atteindre 4,5 lb/entaille cette année. On en a déjà eu 5, mais notre moyenne est plutôt de 3,5 », indique la copropriétaire de Domaine du Cap.
David Bolduc, Chaudière-Appalaches
Fin de l’entaillage : 19 février
Objectif de rendement : 7,5 lb/entaille
Nombre d’entailles : 3 225
David Bolduc venait d’effectuer « sa pratique générale » au moment de l’entrevue, puisque deux petites coulées lui ont permis de faire fonctionner les pompes et donc de vérifier l’étanchéité générale du réseau. Il avait au préalable terminé l’entaillage le 19 février, non sans effort. « Pour avoir le plus de rendement, chaque détail compte. J’entaille comme si j’avais une seule entaille à faire dans ma journée. Je prends le temps de trouver une zone sans vieille blessure. J’ai fait la moitié [de mes 3 225 entailles] à l’escabeau pour aller chercher une partie jamais entaillée. Mais à cause de la neige, je n’ai pas pu continuer à l’escabeau », explique la quatrième génération de Bolduc à exploiter cette érablière. L’acériculteur attend sa saison 2022 de pied ferme, lui qui vise un rendement « conservateur » de 7,5 lb/entaille. Intérieurement, il vise plus haut, ayant en tête son record de 2020 de 9,43 livres à l’entaille. « Mon père a tenu ça sur la coche. Maintenant, c’est à mon tour », dit celui qui surveille son érablière soir et matin, puisqu’elle est située derrière sa résidence. D’ici aux prochaines vraies coulées d’eau d’érable, il s’assure de pomper toute accumulation d’eau dans la tubulure, car par températures froides, l’arbre retire vers lui la sève qui circule dans la tubulure, et si cette dernière comporte des bactéries, elles accélèrent le processus de cicatrisation de l’entaille, ce qui, en fin de course, fait perdre des journées de production, explique l’acériculteur de Saint-Jacques-de-Leeds, qui mise sur un évaporateur à l’huile et un concentrateur à 17 degrés Brix.
Bianka Pagé, Mauricie
Fin de l’entaillage : 25 février
Objectif de rendement : 4 lb/entaille
Nombre d’entailles : 4 000
Bianka Pagé terminait l’entaillage de ses érables au moment de l’entrevue. « La neige fait une grosse différence, c’est épouvantable. Surtout que j’ai beaucoup de pentes, même avec mes raquettes, j’ai calé jusqu’au-dessus de la taille! », commente celle qui installe seule ses 4 000 entailles à Saint-Alexis-des-Monts. Après avoir étudié en acériculture, elle a fondé l’Érablière Pagé-Savard et Filles sur une terre qu’elle a achetée et qui n’avait aucun équipement ni tubulure. « On est partis de zéro », exprime-t-elle fièrement. Cette année sera sa troisième saison des sucres et elle anticipe une hausse des rendements en raison de l’ajout de tuteurs et d’un système de détection des fuites informatisé. Il lui reste encore des maîtres-lignes à installer, mais elle préfère la qualité à la quantité, elle qui a remporté la distinction ultime Grand or, décernée aux sirops d’exception de l’année, lors du concours de la Grande Sève 2021 organisé par la Commanderie de l’Érable. Ce prix n’est pas un hasard, dit-elle humblement puisque Mme Pagé s’était renseignée sur les techniques permettant d’obtenir plus de saveur, comme le fait de prolonger le temps de bouillage et de miser sur un évaporateur au bois qui apporte une certaine variabilité dans l’intensité de chaleur. Son érablière concentre l’eau d’érable à près de 18 degrés Brix et a la chance de ne pas avoir de station de pompage, l’eau descendant entièrement à la cabane. Malgré tout, cette saison des sucres ne sera vraisemblablement pas reposante puisque Bianka est mère de trois jeunes filles, et que son érablière est située à… 1 h 30 de route de la maison! Mais rien n’arrête les gens déterminés et elle compte accroître sa production à 6 000 entailles l’an prochain.
Sandra Gaudet, Témiscamingue
Fin de l’entaillage : pas terminé
Objectif de rendement : 4 lb/entaille
Nombre d’entailles : 600
L’Érablière les petits doigts collants compte 600 entailles et demeure avant tout une partie de plaisir pour Sandra Gaudet et son conjoint, qui possèdent une ferme laitière de 100 kilos à Saint-Bruno-de-Guigues. « L’érablière appartenait à mon oncle et j’ai pris la relève. Ce sera notre 3e saison. Je m’occupe de bouillir et d’embouteiller, tandis que mon père et mon chum s’occupent de tout ce qui est en forêt », dit celle qui participait déjà depuis plusieurs années au temps des sucres. Leur érablière située en terre publique pourrait atteindre les 2 000 entailles dans les prochaines années et une section supplémentaire devrait être entaillée cette année, prévoit Mme Gaudet. « Mon chum, il faut qu’il performe! Il veut entailler une partie dans le versant nord avec de la tubulure 5/16 de couleur grise. La couleur plus foncée est supposée aider à dégeler plus vite. On pourra comparer », souligne-t-elle. L’érablière mise sur un évaporateur au bois et un petit concentrateur leur permettant de concentrer l’eau à huit degrés Brix. L’entaillage, qui prend moins de deux journées complètes, n’est pas effectué trop d’avance.
Wesley Levasseur, Bas-Saint-Laurent
Fin de l’entaillage : pas terminé
Objectif de rendement : 5 lb/entaille
Nombre d’entailles : environ 200 000
Les travaux d’entaillage ont débuté le 3 janvier à la Sucrerie des deux versants, l’une des plus grandes érablières du Québec avec presque 200 000 entailles. Le copropriétaire, Wesley Levasseur, assure que l’entaillage est plus ardu qu’à l’habitude en raison des conditions de neige au sol. Pour cette raison, l’équipe de 15 personnes, qui inclut les copropriétaires, met parfois deux fois plus de temps pour entailler les arbres. L’érablière est composée d’une section en forêt publique de 180 000 entailles, où l’eau est dirigée par tuyaux vers la cabane. Des secteurs situés en forêt privée nécessitent le transport de l’eau d’érable par camion. Avant d’être véhiculée, l’eau est préalablement concentrée à 16 degrés Brix. La cabane à sucre mise sur deux évaporateurs alimentés aux granules de bois. Ces derniers font bouillir l’eau concentrée à près de 30 degrés Brix. Wesley vise un rendement de 5 lb/entaille. « Si j’en fais 4, je serai vraiment déçu. L’an passé, avec un peu plus de 5 lb/entaille, nous avons réussi à faire un million de livres », indique-t-il. L’érablière sous régie biologique a débuté modestement avec 2 000 entailles par les parents de Wesley. L’entreprise située à Saint-Athanase a graduellement grossi, notamment lors de l’arrivée de Wesley au tournant des années 2000 et, plus tard, de celle de son frère. L’entreprise familiale a alors acheté les érablières de voisins à vendre.