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Une plante exotique extrêmement envahissante, le nerprun, couvre rapidement le sol et étouffe la régénération naturelle des érables et de plusieurs peuplements forestiers québécois.
« On est très troublés par ce qui se passe », affirme sans détour Lise Beauséjour, directrice générale de l’Agence de mise en valeur de la forêt privée de l’Estrie. « C’est extrêmement préoccupant. On a des peuplements forestiers envahis par le nerprun où il y a tellement de tiges que nous avons de la misère à marcher. Ce sont des forêts qui ne se régénéreront plus. Nous avons plusieurs cas en Estrie, mais la plupart des régions du Québec n’ont qu’à bien se tenir, car le nerprun s’en vient. C’est un peu comme la COVID. Il est en avance sur nous », constate tristement Mme Beauséjour.
Le nerprun cathartique et son frère, le nerprun bourdaine, sont sans pitié pour les peuplements naturels, que ce soient les forêts de feuillus, de conifères, les plantations ou les érablières. Introduit en Amérique du Nord comme arbuste ornemental, le nerprun bourdaine se développe plus rapidement que les essences indigènes du Québec. Il mise sur un important système racinaire, produit une impressionnante quantité de rejets de souche et peut croître jusqu’à deux mètres… par année! Sa grande production de fruits est transportée tous azimuts par une quarantaine d’espèces d’oiseaux, qui apprécieraient particulièrement ses fruits, indique l’ingénieure forestière Marie-Josée Martel. Afin d’aider les propriétaires forestiers, cette dernière a d’ailleurs rédigé un guide très complet sur la façon de faire face au nerprun.
Un guerrier
Spécifions que le nerprun a la couenne dure. Pratiquement aucune technique autre que la pulvérisation de glyphosate ne vient à bout d’un peuplement établi de nerprun. « Tu en coupes un, il en repousse 20. Tu en coupes 20, il en repousse 100. C’est incroyable comme c’est envahissant », dit Silvio Morin, qui combat l’arrivée du nerprun bourdaine dans son érablière de 20 000 entailles à Dunham, en Montérégie. En guerrier qu’il est, M. Morin n’entend pas laisser les clés de son érablière au nerprun. « Ce printemps, j’ai arraché du nerprun pendant presque une semaine. Si je ne fais pas ça, il prend rapidement beaucoup de place et fait comme un parasol au-dessus de la régénération des érables et des espèces compagnes », déplore l’acériculteur.
La situation du nerprun est stable chez lui, car le producteur y consacre les efforts nécessaires, mais ce n’est pas tous les acériculteurs et forestiers qui sont aussi dynamiques. Par manque de connaissance ou par manque d’intérêt, plusieurs propriétaires ont laissé les choses aller et constatent aujourd’hui qu’il est pratiquement trop tard. Leur forêt est infestée de nerprun, raconte Lise Beauséjour. « Arracher à la main une forêt envahie, c’est presque infaisable. Nous avons essayé, avec une herse forestière, de couper et briser les racines du nerprun et ça n’a vraiment pas fonctionné. Le seul traitement qui donne des résultats, c’est l’[herbicide] glyphosate, mais du Roundup, ce n’est pas très bien accepté dans la société d’aujourd’hui. Présentement, nous essayons un bioherbicide », indique-t-elle.
L’autre problème dans cette guerre contre le nerprun, c’est l’argent. Le gouvernement offre très peu de budgets pour payer les traitements contre le nerprun, indique Mme Beauséjour, spécifiant qu’il s’avérera très coûteux pour le propriétaire qui a trop attendu d’assumer un traitement-choc de 30, 40, 100 hectares de forêt infestée de nerprun. Les forêts non traitées permettront au nerprun de gagner encore plus de terrain, évaluent les intervenants contactés. D’autant plus que les érablières, un milieu généralement dégagé, représentent un terrain de jeu idéal pour cette plante.
Pour en apprendre plus sur les dangers qui guettent les érablières, consultez notre dossier complet dans La Terre de chez nous du 7 juillet.
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