Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
Transformer les anciennes luzernières de la ferme familiale pour se lancer dans la production de noix, c’est le projet un peu « dingue » dans lequel s’est lancé Alain Perreault, propriétaire du Jardin des noix. Treize ans après avoir planté ses premiers noyers, il se prononce sur les hauts et les bas de cette culture émergente.
Lorsque ses parents ont annoncé qu’ils vendaient leur ferme en 2007, Alain Perreault savait qu’il désirait faire les choses différemment. La terre de 35 acres à Saint-Ambroise-de-Kildare dans Lanaudière avait jusque-là servi pour la culture de plantes fourragères. « Je voulais un concept novateur, mais qui n’impliquerait pas le stress de devoir gérer plusieurs employés », relate celui qui a fait carrière comme consultant en démarrage d’entreprises.
Au gré de ses recherches, l’idée de créer une noiseraie a germé dans son esprit. « La production de noix semblait un secteur intéressant. Puisqu’ici, c’est une culture émergente, il y a de la place pour innover. C’est aussi une culture qui peut être mécanisée. » La présence d’une expertise dans ce domaine aux États-Unis, le développement de plusieurs cultivars adaptés à des conditions climatiques similaires à celles du Québec et des essais concluants à petite échelle dans la province ont fini par convaincre Alain Perreault de se lancer dans l’aventure en compagnie de son frère Yvan.
Les deux hommes ont planté de 2007 à 2012 près de 2 000 noyers noirs et 2 000 noisetiers. Pendant cette même période, un greffeur américain a apporté les greffons de huit cultivars du Nebraska, permettant ainsi de faire des tests et de sélectionner les cultivars les plus prometteurs en termes de rusticité et de productivité. Un greffeur québécois a également assisté le verger dans sa démarche.
Une culture lente à démarrer
Il s’agit peut-être du principal obstacle à cette culture : les arbres mettent plusieurs années avant d’offrir un rendement intéressant. Les premières récoltes dignes de ce nom surviennent seulement au bout de 15 ans, et encore, la production peut varier de façon significative d’une saison à une autre. En revanche, les différentes essences de noyers peuvent vivre de 150 à 200 ans.
« Avec le recul, je dirais que c’était un projet dingue! Il y avait tellement d’incertitude à savoir si ça allait être rentable. Je me disais qu’au pire, je pourrais toujours revendre le bois, confie Alain Perreault. Finalement, quand on a vu que les arbres survivaient à l’hiver, on a commencé à s’équiper de façon graduelle. »
D’ici quelques années, le producteur prévoit être en mesure de produire 1000 kilos de noix sèches en coque par acre. « À un prix de 10 à 15 $ le kilo, je peux dégager un revenu moyen de 10 à 15 000 $/acre, sans compter la valeur commerciale du bois, calcule-t-il. Pour une ferme qui voudrait valoriser ses terres marginales ou donner une plus-value à ses haies brise-vent, planter des arbres à noix est une option qui mérite d’être étudiée. »
Opérations mécanisées
La culture de noix présente aussi ses avantages puisque la plupart des étapes peuvent être mécanisées. Bien que les noix tombent au sol lorsqu’elles sont mûres, il est possible de gagner une ou deux semaines en utilisant un vibreur, qui, installé sur le PTO d’un tracteur, secoue le tronc à la base pour en faire chuter les fruits. Après quoi, le passage d’une récolteuse automotrice munie de balais permet de projeter les noix dans une benne.
Pour le conditionnement de la récolte, Alain Perreault a fait fabriquer sur mesure un casse-noix industriel qui prépare 400 kilos de noix à l’heure, comparativement à un kilo à l’heure avec un outil manuel. Les impuretés sont ensuite enlevées au trieur optique.
Les noisettes, quant à elles, doivent être récoltées manuellement. C’est d’ailleurs pourquoi le producteur a ouvert le verger à l’autocueillette.
Faire flèche de toutes noix
Le producteur affirme qu’il est nécessaire de faire preuve d’ingéniosité afin de rentabiliser au maximum son investissement. Outre la vente à la ferme de noix et de noisettes, Alain Perreault a développé plusieurs partenariats avec des artisans locaux pour créer des produits à valeur ajoutée comme du parmesan végétal, des saucissons et des saucisses aromatisées, tandis que les coques sont vendues comme combustible pour les fumoirs.
D’autres produits de deuxième transformation pourraient bientôt voir le jour. « Avec la poudre obtenue à l’étape du cassage, on souhaite presser notre huile de noix, mentionne-t-il. On pourrait même valoriser la coque sous forme de biomasse et utiliser le brou (NDLR : l’enveloppe végétale du fruit) pour en extraire de la teinture végétale. Pour rentabiliser le produit, il faut aller chercher de la valeur à chaque étape du conditionnement. »
Des consommateurs au rendez-vous
Bien que le démarrage d’une noiseraie représente une somme de travail considérable, Alain Perreault se félicite que le public soit au rendez-vous. Il a d’ailleurs aménagé un bistrot à l’intérieur de la boutique afin de faire découvrir ses produits. Les activités d’autocueillette ont également connu un franc succès cet été.
« L’agrotourisme est une dimension essentielle pour l’entreprise, car nos produits sont très différents des noix qu’on retrouve en grande surface. Il faut expliquer et faire goûter, résume-t-il. De cette façon, les consommateurs peuvent se faire une idée et mieux apprécier le produit. Mais une chose est sûre : la réponse du public est excellente. »
Pour plus d’informations sur la culture des noix : http://www.noixduquebec.org